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LOUISE

N’avez-vous pas encore une autre raison à donner ?

VALROGER

Une autre raison ?

LOUISE

Vous ne voulez pas la dire ! Non ! ce n’en est pas une pour vous. Vous avez trop de générosité pour exiger une réparation ; mais voulez-vous savoir une chose ? C’est qu’au moment où vous êtes entré ici, si j’avais écouté mon premier mouvement, je vous aurais sauté au cou ; ne prétendez pas que c’eût été une reconnaissance exagérée. Je sais tout, monsieur de Valroger, je sais qu’une de ces joues-là a été frappée par le gant de mon pauvre étourdi de frère, et, comme je ne sais pas laquelle…

VALROGER

Toutes deux, madame, toutes deux !

LOUISE

Je ne dis pas le contraire ; mais toute réparation demande des témoins, et justement en voici qui nous arrivent. (Elle l’embrasse sur les deux joues devant M. de Louville et sa femme qui viennent d’entrer. Anne pousse un grand cri de surprise, M. de Louville éclate de rire. Valroger met un genou en terre et baise la main de Louise.)

VALROGER

Merci, madame, merci !

M. DE LOUVILLE, riant.

Bravo, mon cher ! voilà qui s’appelle enlever d’assaut les citadelles imprenables.

VALROGER

C’est-à-dire que c’est moi la forteresse, et que je me suis rendu à discrétion ! (Bas, pendant que Louise va en riant auprès d’Anna.) Dites-moi, Louville, est-ce qu’il n’y a pas moyen d’épouser cette femme-là ?

M. DE LOUVILLE

Allons donc ! Elle a peut-être quarante ans !

VALROGER

En eût-elle cinquante !

M. DE LOUVILLE

Ah bah ! mais elle a aimé son mari, elle adore son fils… Non, c’est impossible !

VALROGER

C’est dommage ; c’eût été pour moi le seul moyen de devenir un homme sérieux !

FIN