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de toutes les crises, c’était de s’acheminer vers une fixité plus complète dans la république par la nomination d’un vice-président, par le renouvellement partiel de l’assemblée, au besoin par l’organisation d’une seconde chambre. Pour les autres, pour les monarchistes de l’assemblée, l’essentiel était de tenir une monarchie toute prête. En définitive, c’est là le germe de ce qui s’est passé depuis quelques jours ; ne demandez pas trop ce qu’on a fait de sérieux dans l’assemblée. La droite modérée a délibéré et préparé un programme. L’extrême droite, la fraction des légitimistes purs, a paru se rallier à l’œuvre conçue par d’autres. Le centre droit a écrit une lettre pour adhérer au programme de la droite, mais en précisant ses conditions en faveur des institutions parlementaires et en faisant ses réserves notamment pour le drapeau. Bref, on a fait des manifestes, des lettres, des contre-lettres, des voyages à Anvers pour aller voir M. le comte de Chambord, pour savoir de lui ce qu’il en pensait, et, ce qui ne laisse pas d’être assez curieux, c’est qu’on ne sait toujours rien ni de ce que pense M. le comte de Chambord, ni de ce que dit le manifeste de la droite, ni de ce que contient la lettre du centre droit, dont la rédaction paraît d’ailleurs être aussi habile que sensée.

Au milieu de toutes ces mystérieuses combinaisons, deux faits cependant sont assez caractéristiques. L’adhésion de l’extrême droite, en paraissant compléter la fusion des élémens royalistes, n’est point certainement sans avoir donné à réfléchir sur la nature de cette monarchie qu’on élaborait, autour de laquelle on appelait tous les concours. D’un autre côté, le voyage que M. le comte de Chambord vient de faire à Anvers, et qu’il n’a fait évidemment que pour être plus à la portée de la France, ce voyage n’a pas eu peut-être tout le succès qu’on s’en promettait. À part les bruyantes manifestations locales qu’il a provoquées dans la ville d’Anvers, et dont les Belges auraient pu fort bien se dispenser, il a pour ainsi dire accentué une attitude, des tendances qui n’ont pas dû très puissamment encourager Télaii monarchique, de sorte que le mouvement s’est arrêté plutôt qu’il ne s’est étendu. Il a trouvé des récalcitrans même parmi des monarchistes, parmi ceux qui le jugeaient inopportun ou qui voulaient du moins savoir ce qu’ils faisaient, et en définitive, pour une telle manifestation, on est arrivé à réunir de 250 à 300 adhésions. Est-ce là ce qu’on appelle la fusion monarchique, la reconstitution d’un seul parti monarchique ? Soit, il resterait seulement à savoir dans quelles conditions s’est opérée cette reconstitution, sous quel drapea ; u elle s’est accomplie, quelle signification et quels effets elle peut avoir dans les circonstances.

Allons au fond des choses. Assurément ceux qui ont cru que le moment était venu d’en finir avec les divisions des forces monarchiques ont obéi à une inspiration généreuse ; ils n’étaient pas sans prévoyance, puisqu’une crise qui pouvait se renouveler venait de les avertir du péril ;