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LES ANCIENS BANQUIERS
FLORENTINS
SOUVENIRS D'UN VOYAGE A FLORENCE

De toutes les républiques italiennes du moyen âge, Florence fut assurément la plus puissante et la plus illustre. Elle sut habilement se servir des navires de Pise et de Gênes, et aborder avec eux, elle qui n’avait pas de ports de mer, tous les marchés de l’Europe et de l’Orient. Elle fut grande par les armes comme par les affaires, et conquit peu à peu toutes les républiques voisines ; Pise, Sienne, finirent par se ranger sous sa loi. C’est au commerce surtout que Florence a dû ses succès. On est étonné de voir que les historiens qui nous ont parlé d’elle, soit les vieux chroniqueurs, tels que Dino Compagni, Villani, Ammirato, Machiavel, soit les historiens de nos jours, tels que Sismondi, aient glissé légèrement sur cette véritable cause de la grandeur florentine. Villani, qui fut l’associé des plus puissantes compagnies de banque de son temps, qui voyagea pour elles dans toute l’Europe, nous parle à peine des opérations de ces riches marchands ; la lutte incessante des guelfes et des gibelins est surtout ce qui le préoccupe. Il faut en dire autant des autres chroniqueurs. Si l’on écrivait l’histoire politique moderne de l’Angleterre, on pourrait passer sous silence le travail des mines, des forges, des manufactures, qui a créé cependant l’énorme richesse de ce pays ; en effet, ce ne sont ni les exploitans de mines, ni les maîtres de forges, ni les filateurs de coton qui y sont à la tête des affaires. A Florence, il en était autrement : les plus grands marchands de la république furent les chefs des principales factions de cette turbulente cité, notamment de la faction guelfe.