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collections, il n’y a que des entassemens. Qui croirait que le Muséum d’histoire naturelle, ce grand établissement scientifique que Buffon, Cuvier, Geoffroy Saint-Hilaire, ont illustré à jamais, qui plus que tout autre doit se tenir au courant des découvertes nouvelles et les provoquer, n’a qu’une somme de 25,000 fr. inscrite à son budget pour « voyageurs naturalistes ? »

C’est assez ; le lecteur doit être édifié et comprendre que, si les instituts de l’enseignement supérieur sont dans cet état, l’enseignement supérieur lui-même ne vaut guère mieux. Ne pas donner aux professeurs les moyens matériels de démonstration, ou livrer bataille sans être armé, c’est tout un. Si le laboratoire de l’université de Heidelberg n’avait pas été convenablement outillé, MM. Bunsen et Kirchhoff n’auraient point découvert l’analyse spectrale, à laquelle oh doit déjà deux nouveaux métaux, et M. Helmholtz n’aurait pas pu faire les expériences qui déterminent les lois de l’acoustique. — A Paris, je ne vois que trois laboratoires convenables et munis d’appareils sérieux : un pour la physique à la faculté des sciences, deux pour la chimie à l’École normale supérieure et au Jardin des Plantes. Il est question, et depuis très longtemps déjà, d’agrandir le Muséum d’histoire naturelle et l’École de. médecine. Ces deux établissemens ne sont pas à modifier, ils sont à remplacer. On ne peut augmenter l’un qu’en faisant des constructions dans les jardins, qui lui sont indispensables ; on ne peut accroître l’autre qu’en le laissant dans un quartier d’où il devrait disparaître, et en lui donnant les terrains occupés actuellement par les Cliniques, qu’on reporterait alors à Necker, à Saint-Antoine ou à Saint-Louis. Il y aurait mieux à faire et un parti radical à prendre. Il ne faut pas se dissimuler cependant que l’heure est douloureuse, qu’elle est mal choisie pour demander à la France un grand sacrifice ; mais le jour viendra où, rentrés dans notre richesse normale, nous pourrons nous tourner tout entiers vers les fécondes entreprises de la paix. Il sera bon alors de regarder du côté de ces grands instituts scientifiques dont nous avons été si fiers, qui ont été, qui doivent redevenir notre honneur même, et peut-être ferions-nous bien de commettre la sage folie de ne rien réparer et de tout reconstruire. Ce n’est pas l’emplacement qui manquera : il est tout indiqué, je l’ai déjà signalé ; j’y insiste de nouveau en prévision de temps plus prospères. L’entrepôt des vins et liquides n’a plus de raison d’être, puisqu’il est remplacé par l’immense entrepôt créé à Bercy ; la Salpêtrière, qui contient 31 hectares, abrite des folles que l’on peut bien transporter ailleurs, et des vieilles femmes qui seraient beaucoup mieux dans un hospice établi à la campagne. C’est là, sur l’emplacement de l’entrepôt et sur celui du