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intérieure, elle s’est montrée constamment unanime dans sa polémique à notre sujet ; quelquefois ardente, rarement modérée, mais s’inspirant toujours de l’attitude des journaux officieux. » Rien de plus intéressant à observer que ses évolutions dans la question italienne. En 1859, les patriotes allemands n’étaient pas éloignés de considérer les places fortes du quadrilatère comme des forteresses fédérales, et c’était alors un mot d’ordre qu’il fallait défendre le Rhin sur le Mincio. Dans son manifeste du 28 avril, l’empereur d’Autriche, faisant appel à l’Allemagne, évoquait les souvenirs de 1813. « La seule politique alors possible, dit un historien unitaire de l’Allemagne, était d’appuyer l’Autriche en stipulant des conditions profitables à l’Italie et à l’Allemagne. » Les choses ont bien changé : les intérêts se sont déplacés ; la Prusse et l’empire allemand ont trouvé dans l’Italie un allié fort utile. Il n’y a pas d’éloges que les feuilles allemandes ne lui décochent à tout propos ; elles ne négligent aucune occasion de déclarer à l’Europe l’amitié qui unit les deux pays. C’est un concert parfait ; personne n’y saurait trouver une note qui détonne. L’ensemble n’a pas été moins complet quand il s’est agi tout récemment de montrer à l’Angleterre qu’on n’avait pas oublié sa conduite envers la France en 1870-71. Un journal anglais avait reproché aux Allemands leurs sentimens hostiles à propos de l’affaire de Khiva. La Gazette de Cologne s’expliqua à ce sujet de la manière la plus catégorique.


« Que l’Allemagne, disait-elle, professe à l’endroit de l’Angleterre une véritable haine, c’est un jugement fondé sur des observations partiales. Pour étudier le développement complet de la haine contre un peuple voisin, il faut se tourner vers la France, où l’on voit, ce qui n’est ailleurs le fait que des couches sociales les moins cultivées, la haine internationale se tourner contre chaque membre de la race détestée, où l’Allemand, fût-il en politique l’être le plus inoffensif du monde, n’est pas seulement évité, mais encore exclu de la société. Les Anglais ne sont exposés à rien de pareil en Allemagne. Le mot de haine est trop fort pour caractériser l’éloignement politique qui s’est produit chez nous à leur égard. La faute en est à eux. Leur conduite dans notre guerre nationale avec le Danemark était presque oubliée, lorsque l’Angleterre a de nouveau provoqué la susceptibilité des Allemands par son attitude dans la guerre contre la France ; elle avait d’abord condamné énergiquement l’outrageuse agression des Français ; mais elle ne permit pas moins à un misérable esprit mercantile de prolonger la guerre en fournissant des armes à notre ennemi. Le sang allemand a été répandu par les balles anglaises ; l’Allemagne en a ressenti beaucoup de mauvaise humeur. Toutefois nous ne croyons pas être en droit de dire qu’un