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lonté le programme des travaux parlementaires dont on peut avoir encore à s’occuper, la question n’est pas là précisément. Il s’agit avant tout de savoir si l’assemblée, s’abandonnant aux passions, aux excitations, aux ressentimens des partis qui s’agitent dans son sein, bravera le danger de périr elle-même d’impuissance en laissant la France livrée à tous les hasards de la crise la plus périlleuse, ou si, dominant toutes les considérations secondaires, toutes les passions violentes, elle restera d’accord avec le gouvernement pour sauvegarder la sécurité du pays, pour préparer un système de transition qui, au point de vue intérieur, complète cette paix étrangère dont le traité du 15 mars est le dernier mot.

La question est là pour le moment, elle n’est point ailleurs. En réalité, l’assemblée n’a pas trop le choix d’une politique ; elle se trouve placée entre ce qu’elle ne peut pas faire et ce qu’elle ne veut pas laisser faire. Ce qu’elle veut certainement empêcher, c’est qu’à la faveur de l’incertitude et du trouble qui peuvent se produire dans une crise d’élection le radicalisme ne parvienne à s’emparer du pays pour le précipiter dans des convulsions nouvelles. Ce qu’elle ne peut faire d’un autre côté, elle le sent peut-être plus que jamais, c’est la monarchie. Dès lors la voie semble toute tracée ; elle a été ouverte en quelque sorte par cette loi des trente qui, à la veille même du traité de libération, indiquait les moyens ou les combinaisons les plus propres à ménager une transition pacifique, à créer un certain ordre régulier, sans engager la souveraineté nationale, dernier et unique arbitre des destinées de la France. Eh ! sans doute les partis ne sont pas contens. Les opinions extrêmes ont marché avec ensemble contre cette malheureuse loi des trente, qui ne donnait pas raison à leurs espérances et à leurs prétentions. L’extrême droite, il faut l’avouer, est particulièrement en ébullition ; elle ne pardonne ni au gouvernement, ni même aux partisans sensés de la monarchie, qu’elle appelle des défectionnaires parce qu’ils se sont ralliés, dans l’intérêt de la paix intérieure de la France, à la politique de modération dont la loi des trente était l’expression.

Non certes l’extrême droite n’est pas contente, et, par un phénomène qui n’a rien de nouveau, plus elle voit diminuer ses chances de succès, plus elle s’irrite. Que M. l’évêque d’Orléans ait la hardiesse de chercher à éclairer l’esprit de M. le comte de Chambord sur les nécessités des temps modernes, M. l’évêque d’Orléans est manifestement un traître. Aujourd’hui c’est M. de Falloux lui-même qui ne peut trouver grâce aux yeux de ces farouches de la légitimité, qui forment une sorte de démocratie royaliste révoltée contre ses chefs. M. de Falloux a un tort, il est vrai, il ne consent pas à reconnaître à M. le comte de Chambord le droit de désigner pour son successeur au trône de France un « infant d’Espagne » ou bien « M. le duc de Parme, » ou bien encore