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L’espèce qui fait exception est le Danaïs archippus, qui se montre dans les parties centrale et septentrionale de l’Amérique. Ce que l’on connaît des insectes açoriens les rattache donc aussi à la faune de l’Europe. Il en est de même pour les crustacés terrestres, et les myriapodes ; même conclusion encore pour les mollusques terrestres. L’important travail de MM. Morelet et Drouet fournit des documens nombreux et précis sur les relations spécifiques de ce groupe zoologique. Un premier fait signalé par ces naturalistes est l’absence de toute espèce fluviatile aux Açores. Cette donnée capitale est le pendant du fait si singulier de l’absence des mammifères, des poissons d’eau douce, des reptiles et des batraciens indigènes. Les recherches les plus minutieuses n’ont pas amené la découverte du plus petit mollusque, ni dans les lacs, ni dans les marécages, ni dans les cours d’eau, ni dans les petites fontaines des régions montagneuses, qui sont si nombreuses et jamais complètement à sec. À part la grenouille, dont l’introduction est toute récente, l’anguille et le cyprin, dont l’importation me paraît également certaine, les eaux douces des Açores ne contiennent d’autres organismes vivans que quelques larves d’insectes et quelques plantes aquatiques. Avant l’arrivée des Européens, la vie animale devait y être à peu près nulle. Cette lacune est d’autant plus étonnante qu’aux Madères et aux Canaries les mollusques d’eau douce abondent.

Les mollusques terrestres des Açores appartiennent à 69 espèces, dont 26 se rattachent à la faune d’Europe, 11 à celle de Madère et des Canaries, 32, c’est-à-dire environ la moitié, sont propres au pays. C’est donc encore avec l’Europe que les affinités zoologiques sont le mieux marquées. Le chiffre total de 69 espèces paraît bien faible, si on réfléchit combien le climat doux et humide des Açores est en harmonie avec l’organisation d’animaux dont le corps est mou et dont la respiration se fait à l’aide de délicates membranes superficielles. Cette faune semble encore plus pauvre, si on la compare à celle des deux archipels voisins.

Sous un ciel tempéré et, au milieu d’une atmosphère humide comme celle des Açores, on pourrait croire que les mollusques terrestres sont-actifs et se montrent souvent en dehors. Après les pluies d’été, on sait combien nos escargots et nos limaces aiment à entrer en campagne ; on est donc étonné de voir les habitudes casanières des animaux des mêmes familles aux Açores. À L’exception de quelques hélices, qui se fixent contre les murs ou adhèrent aux plantes, tous les autres se tiennent cachés pendant le jour, immobiles sous les pierres, sous les feuilles sèches, au pied des broussailles ou sur les tiges basses des végétaux. Quelques bulimes et certaines hélices possèdent seules une taille notable et