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D’abord il serait assez intéressant de savoir comment Paris pourrait avoir à venger Lyon, parce qu’on donne tout bonnement à Lyon le régime municipal dont Paris lui-même se contente parfaitement, parce qu’on enlève à la cité du Rhône une mairie centrale que la cité de la Seine ne possède pas et qu’elle ne réclame pas ; mais en réalité la question n’est pas là elle n’est ni là ni dans toutes ces subtilités laborieuses par lesquelles on s’efforce d’abuser le public en travestissant les élémens les plus simples d’une situation. La vérité dans la lutte qu’on ne craint pas d’engager, la voici. M. de Rémusat est M. de Rémusat, le ministre des affaires étrangères qui vient d’être l’heureux négociateur de la libération du territoire, le membre du gouvernement représentant, sous la république comme sous la monarchie, au pouvoir comme dans l’opposition, toutes les traditions libérales, l’homme éminent par l’esprit et par le caractère. Sa profession de foi et son programme sont tout tracés dans les services qu’il vient de rendre, dans sa carrière, dans ses travaux. Il ne peut rien dire de plus, et si on lui proposait, comme on le lui a fort singulièrement demandé, de désavouer quelques-uns de ses collègues du ministère, M. Dufaure, M. de Goulard, dans l’intérêt de sa candidature, il est probable qu’il tiendrait la proposition pour peu sérieuse. Au point où en sont les choses, M. de Rémusat est devenu plus qu’un candidat ordinaire ; il représente désormais dans cette lutte le gouvernement tout entier, la république libérale, régulière, subordonnée à la souveraineté nationale, telle que l’entend le gouvernement. Quant à M. Barodet, il a le mérite, fort apprécié à ce qu’il paraît dans certaines régions, d’être un inconnu, de sortir on ne sait d’où, de la boîte aux surprises électorales, du club de la rue Grolée de Lyon. Ce qu’il est par lui-même, on ne le sait guère, et on ne s’en informe pas depuis qu’il est convenu, comme on le disait ces jours derniers dans une réunion publique, qu’il ne faut plus ni titres personnels, ni mérite, ni connaissance des affaires pour aspirer à représenter ses concitoyens ! Ce que représente M. Barodet, on le voit trop : il est le prête-nom de la république radicale, turbulente, agitatrice, toujours périlleuse pour l’intégrité nationale, — de la république avec des communes à Paris et à Lyon, avec toutes les fantaisies de violence et d’incapacité qui se déploient dans les rapports instructifs qu’on publie sur la période de la défense nationale. On peut choisir maintenant. La situation est en effet fort simple, comme on le dit, elle est de plus assez grave.

Cette lutte, le gouvernement semble résolu à l’accepter ; il ne pouvait plus faire autrement, il a pour lui la complicité de tous les sentimens de patriotisme, de libéralisme et de conservation. Que les radicaux s’agitent, fassent du bruit, c’est leur affaire. Est-il bien sûr que ceux qui semblent conduire le parti et qui se laissent traîner à la remorque des plus vulgaires meneurs désirent beaucoup le succès ? Se sont-ils demandé ce qui arriverait le lendemain du jour où ils auraient réussi ? Ce qui ar-