convaincus que l’Italie ne peut pas abandonner la position qu’elle a prise à Rome, et qu’ils se seront fatigués de payer l’obole de saint Pierre qu’on leur demande en larmoyant sur le prétendu dénûment et la misère du chef de leur religion, celui-ci, qu’il s’appelle Pie IX ou autrement, aidera le gouvernement à exécuter l’unique disposition de la loi des garanties qui dépend de lui, et recevra la rente annuelle qu’on lui a destinée. Cette rente correspond, à un denier près, à celle qu’il prélevait pour sa cour et pour ses menues dépenses sur le budget pontifical.
Ainsi cette loi des garanties, loi constitutionnelle de freins et de limites que l’état s’impose à lui-même, n’a rien souffert de l’opposition persistante que le pape et le clergé ont continué de faire au gouvernement italien à Rome. En l’examinant théoriquement, on pourrait à coup sûr la cribler de critiques. Les avocats de la chambre n’y ont pas manqué avant, pendant et après la discussion. Ce n’est pas en effet un mince inconvénient pour l’état que de sauvegarder ainsi et d’entourer de défenses une institution qui lui est hostile. Quel autre gouvernement en Europe en eût fait autant ? Il fallait l’état actuel des esprits en Italie pour que le gouvernement pût laisser une telle liberté, une telle inviolabilité au chef de l’église. La religion catholique est professée par le très grand nombre des Italiens, mais sans ardeur. La passion religieuse est éteinte chez eux au point qu’il est permis de douter qu’elle revive jamais. On dit que, si cette passion ne se manifeste pas aujourd’hui, c’est parce que le catholicisme, assuré de son existence matérielle sous la sauvegarde du droit public, n’éprouvait pas jusqu’à présent le besoin de la surexciter ; mais toute excitation se heurtera toujours à l’esprit pratique et calme des Italiens, et n’en fera jamais ni des carlistes ni des légitimistes. Si le caractère italien ne change pas, — ce qui n’est guère probable, — les Italiens continueront d’envisager la religion comme ils l’ont fait de tout temps. Ils n’en voudront ni trop ni trop peu, ils la mêleront utilement aux circonstances publiques et privées de leur existence, à la façon de leurs ancêtres, l’acceptant telle que ceux-ci la leur ont léguée ; mais ils ne lui permettront pas de s’attribuer des droits tracassiers qui troubleraient la vie civile et nationale de leur pays.
C’est cette disposition d’esprit chez le peuple qui a permis au gouvernement italien non-seulement de rester à Rome depuis 1870, ce qui était facile, mais d’y rester avec tant de mesure, ce qui était difficile, à tel point qu’aucun autre gouvernement peut-être n’y aurait réussi. C’est encore dans cette disposition d’esprit qu’on