germanique. La question de la langue joue un grand rôle dans les préoccupations du gouvernement prussien ; il voudrait détruire ce vivant symbole du passé, cette langue si bien nommée langue de la mère ou de la patrie, si douce et si sacrée à l’opprimé, et avec elle la religion récalcitrante qui se plie mal aux soumissions forcées. C’est la raison que le chancelier a donnée sur tous les tons quand il a bien voulu s’expliquer, car au début de la discussion il demandait un acte de foi implicite qui revenait à dire : « Vous ne demandez pas de compte à la Providence, ne m’en demandez pas davantage ; seul je vois tout, je sais tout. » Il a cru nécessaire à cette occasion de faire une profession de piété éclatante. « Pour ce qui, dans mon discours, concerne l’aveu et la profession d’une foi vivante et chrétienne, je n’hésite à la faire ni devant le public ni devant ma maison. Ma foi vivante, évangélique et chrétienne m’impose le devoir dans le pays où je suis né, et pour le service duquel Dieu m’a créé, de défendre la charge qui m’est confiée, non-seulement contre les faiseurs de barricades, mais contre ceux qui oublient qu’ils sont faits pour consolider les bases de la société et non pour les ébranler. » L’éminent orateur a éprouvé le besoin de donner à cette foi évangélique quelques appuis matériels contre ses opposans, et il ne s’est pas fait faute d’exagérer outre mesure le péril du nouvel empire, pour qu’on lui fournît les moyens de supprimer l’opposition elle-même.
Une troisième loi fut présentée dans cette même année 1872 au Reichstag de l’empire, c’est celle qui supprime l’ordre des jésuites et tous les ordres à lui affiliés. L’affaire fut engagée par de nombreuses pétitions venues de tous les points de l’Allemagne, et sans nul doute très encouragées de haut. On se souvenait sans doute que M. de Bismarck s’était déclaré prêt à combattre aussi bien l’Internationale noire que l’Internationale rouge. Il serait fastidieux de nous arrêter aux débats soulevés par cette proposition. Nous y retrouverions le même impératif catégorique de la part du maître, une opposition vaine de la part de la fraction catholique du Reichstag, la même souplesse empressée de la gauche, qui cette fois a déclaré hautement qu’elle apportait ses principes en sacrifice sur l’autel de la patrie, enfin la même docilité chagrine de la chambre haute, qui ne résiste que juste assez pour donner du prix à son abandon final. Triste spectacle que cette comédie parlementaire qui transforme les assemblées en chancelleries légalisant des décrets dictatoriaux ! La loi contre les jésuites méritait cependant la peine d’être sérieusement discutée, car elle engageait des principes constitutionnels très graves. 1° Les membres de la société de Jésus ou des ordres qui lui sont affiliés peuvent être exclus du territoire sur simple mesure de police, même quand ils