renouvelées. Syra surtout avait le privilège d’exciter au plus haut degré l’animosité de ses turbulens voisins. La presque totalité des habitans de cette île professait la religion catholique ; il y avait là un évêque, une cathédrale, des établissemens religieux. Les mœurs et les habitudes de la communauté se ressentaient des soins d’un clergé pauvre, mais fidèle à ses devoirs. Grâce à notre protection, Syra avait réussi à garder la neutralité ; les autres îles de l’Archipel et la partie orientale de la Morée venaient s’y approvisionner des grains apportés par les bâtimens russes de la Mer-Noire, par les bâtimens autrichiens d’Alexandrie. Les catholiques syriotes ne prenaient pas de part à ce commerce ; à peine recueillaient-ils quelques légers bénéfices résultant du transit. Tout l’avantage de cette position unique dans l’Archipel était donc pour les Grecs, qui n’eussent trouvé nulle part un marché mieux placé, un entrepôt approvisionné à moins de frais. L’envie, cette mauvaise conseillère des individus et des peuples, ne leur laissa pas voir cependant sans une rage jalouse la prospérité passagère de Syra. L’île catholique se trouva soudainement assaillie par tous les bandits de l’Archipel. En cette difficile occurrence, les mesures prévoyantes et énergiques du capitaine Hargous, qui ne commandait cependant qu’une goélette, préservèrent Syra du pillage. Le capitaine de Rigny se porta de sa personne le 4 mars 1823, avec la Médée, sur le théâtre des troubles. Les craintes étaient déjà calmées, l’ordre à peu près rétabli. « J’ai trouvé, écrivait-il au ministre de la marine, des cœurs pénétrés de la plus vive reconnaissance, et je me suis senti glorieux d’être Français. Lorsque je descendis de la ville pour me rembarquer, le rivage, qui la veille encore ne répétait que des cris d’angoisse et de fureur, se couvrit de toute la population agenouillée et bénissant le nom du souverain de la France. Tel est le spectacle dont j’ai été le témoin. Ce succès est entièrement dû à la fermeté et à la présence d’esprit du lieutenant de vaisseau Hargous. »
Ainsi grossissait insensiblement l’hostilité sourde qui, au sein même de la station, devait constituer un parti peu favorable à la cause de la Grèce. Les hommes dont la première vertu est le respect de l’ordre et de la discipline sympathisent difficilement avec les auteurs des excès qu’ils se voient obligés de châtier. M. de Latour-Maubourg était arrivé à Constantinople sur la corvette la Cornaline le 26 décembre 1821. Le 28 janvier 1823, il informait le capitaine de Rigny « que le roi avait daigné accueillir ses vœux et lui permettre de rentrer en France. » Le 20 février en effet M. de Latour-Maubourg quittait Constantinople par la voie de terre, après avoir dû successivement prendre passage sur la gabare l’Active et sur la flûte l’Ariège. La France perdait en lui un représentant très digne et très capable, un agent très propre à consolider notre