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sablonneux, en arrière duquel se sont amoncelées les alluvions des deux fleuves. Ce terrain à demi noyé est entrecoupé de lacs, de lagunes, de bancs de vase, de pêcheries recouvertes de quelques pouces d’eau à peine. Le lac de Missolonghi et le lac d’Anatolikon, situé plus au nord, communiquent par un canal d’un pied et demi environ de profondeur. Le lac de Missolonghi est de beaucoup le plus vaste ; cependant il n’y peut entrer et circuler que des bateaux plats. La ville, distante de la mer de trois milles environ, est adossée au lac. Suffisamment protégée sur deux de ses faces par les terrains marécageux qui l’entourent, elle n’a d’attaques à craindre que du côté du nord et du côté de l’est. Les troupes qui la veulent investir doivent venir d’Anatolikon, de la vallée du Fidaris ou du ravin qui longe la croupe du mont Zyrgos. Depuis le premier siège qu’elle avait subi en 1822 et en 1823, l’enceinte de Missolonghi s’était sensiblement améliorée. On avait approfondi le fossé, muni le long rempart de terre qui s’étendait du bord de la lagune à l’autre extrémité du promontoire de tours et de bastions, mis en batterie quarante-huit canons et quatre mortiers. La petite île de Vasiladi formait entre le rivage intérieur du lac et la mer une espèce d’ouvrage avancé. On y avait installé six canons et entassé deux mille femmes et enfans, bouches inutiles dont la garnison avait tenu à se défaire. En dépit de cette précaution, Missolonghi renfermait encore dans ses murs une population de 12,000 âmes. La garnison comprenait 4,000 soldats environ, sans compter un millier d’habitans et de bateliers en état de porter les armes.

Après les assauts infructueux qu’il avait livrés dans les premiers jours du mois de juillet, Reschid-Pacha, abandonné le 6 août par la flotte ottomane, harcelé sur ses derrières par les troupes de Karaïskaki, se trouvait dans une position des plus critiques. Le 19 août, Zavellas pénétrait dans la place avec ses Souliotes, et venait imprimer à la défense un redoublement d’énergie. Le 17 octobre 1825, l’armée de Reschid, réduite à 3,000 fantassins et 600 cavaliers, dut lever le siège de Missolonghi et aller s’établir au pied du mont Zyrgos. Un cri de triomphe retentit à l’instant dans la Grèce, cri imprudent, triomphe prématuré, car un ennemi plus formidable que Reschid-Pacha allait changer ces cris de triomphe en cris de détresse. Maître du Péloponèse, Ibrahim se portait à marches forcées de Navarin sur Patras. Le 18 novembre, la flotte du capitan-pacha et la flotte égyptienne arrivaient dans le golfe de Lépante et y débarquaient 8,000 Arabes. Ibrahim n’avait pas rencontré dans sa marche à travers la Morée plus d’opposition que n’en avait trouvé sa flotte pour venir d’Alexandrie et de Navarin. Le 29 novembre, il était de sa personne à Lépante. La flotte grecque apparat