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contribution les tableaux de chevalet, les crayons, les estampes de toute sorte qui avaient successivement paru en France ou dans les pays étrangers ; il fallait en un mot ajouter un épilogue au récit commencé et résumer les vicissitudes relativement récentes de la mode dans une suite de types caractéristiques, depuis les fastueux courtisans de Maximilien ou de Charles-Quint jusqu’aux beaux du temps de la reine Anne, depuis les raffinés sous le règne de Louis XIII jusqu’aux merveilleuses et aux incroyables du directoire.

Cette entreprise vraiment opportune, un artiste distingué, M. Lechevallier-Chevignard, et un écrivain expert en matière d’iconographie, M. George Duplessis, la tentaient il y a quelques années : ils l’ont aujourd’hui menée à bonne fin. Le goût et la fidélité avec lesquels les modèles que devait reproduire la gravure ont été choisis et dessinés, la netteté des explications qui accompagnent chaque planche et qui, sans ostentation scientifique comme sans prétention littéraire, se bornent à quelques renseignemens sur les origines ou la destination spéciale des ajustemens représentés, — tout révèle chez les auteurs du nouveau recueil de Costumes historiques l’intention de s’effacer autant que possible pour mieux mettre en vue les résultats de leurs recherches et pour dégager avec plus de précision le sens des documens qu’ils nous transmettent. Veut-on apprécier par le contraste ce qu’il y a de méritoire et à certains égards d’inusité dans l’abnégation dont ils ont fait preuve ? Que l’on rapproche des planches qu’ils publient les planches du grand ouvrage de Montfaucon, les Monumens de la monarchie française, ou, si l’on est curieux de savoir jusqu’où peuvent aller en pareil cas la licence des interprétations et le mensonge pittoresque, que l’on jette les yeux sur ces Costumes des anciens peuples qu’un membre de l’académie royale de peinture, Dandré Bardou, destinait avec une impertinence ingénue « à l’usage des artistes et à l’instruction des gens du monde : » on sentira de reste la différence entre l’esprit qui a inspiré ces œuvres à peu près de fantaisie et les principes dont les nouveaux Costumes historiques sont l’expression à la fois discrètement érudite et loyale. Il y a là nous le répétons, et le titre même du recueil l’indique, le complément de la tâche que s’étaient imposée M. Bonnard et M. Mercurj, l’application à des sujets d’un autre ordre de la méthode qu’ils avaient adoptée ; mais il y a là aussi des témoignages très personnels de sagacité, de bonne foi, de zèle pour les intérêts des artistes et du public. Quelque modestes que soient les formes sous lesquelles ils se produisent, des efforts aussi consciencieux, des travaux aussi utiles méritent au moins d’être signalés.


HENRI DELABORDE.


Le directeur-gérant, C. BULOZ.