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reproduit les types choisis qu’à titre de portraits directs, d’exemples isolés des exemples antérieurs ; il n’y avait là en réalité que des renseignemens partiels subdivisés à l’infini, et ne pouvant en raison de leur multiplicité même trouver place dans les bibliothèques privées. Sous le règne de Louis XIV, il est vrai, un curieux célèbre, Roger de Gaignières, avait eu la, pensée de rassembler les élémens d’une histoire du costume en France à partir des premiers siècles de la monarchie, et la collection formée par lui sous le modeste titre de Modes mérite encore d’être comptée parmi les plus intéressantes et les plus instructives qui existent sur la matière ; mais, comme les documens dont elle se compose concernent exclusivement des personnages appartenant à notre pays, comme en outre le crayon et le pinceau ont été ici les seuls instrumens employés, la collection de Gaignières, si bien connue qu’elle soit des habitués de la Bibliothèque nationale, n’a et ne peut avoir que l’utilité restreinte d’une section dans l’histoire générale de l’habillement et le caractère d’un recueil à l’état d’exemplaire unique. C’est à des érudits de notre siècle que revient le double mérite d’avoir pour la première fois étendu aux diverses nations de l’Europe les recherches qu’on s’était contenté de faire pour consacrer des souvenirs strictement français, et, cette entreprise d’ensemble une fois conçue, d’avoir choisi les moyens matériels les plus propres à en divulguer les résultats.

Parmi les ouvrages de ce genre qui ont paru en France depuis l’époque de la restauration, un des plus importans à tous égards, un des plus justement estimés est celui dont M. Camille Bonnard a écrit le texte et dont les planches sont dues au burin d’un graveur aujourd’hui célèbre, M. Mercurj[1]. Tout le monde connaît ce recueil, que l’authenticité des monumens reproduits recommande auprès des simples curieux aussi bien qu’auprès des hommes voués, aux études historiques. Quant aux artistes, ils s’en servent comme d’un manuel où chacun d’eux, — peintre d’histoire, de genre, ou simple dessinateur de vignettes, — trouve presqu’à coup sûr de quoi satisfaire aux exigences particulières de sa tâche, et depuis que par un autre ouvrage, publié de 1840 à 1854 en Allemagne sous le titre de Costumes du moyen âge chrétien, M. de Hefner est venu compléter à sa manière le travail de M. Bonnard, on peut dire que pour toutes les époques antérieures à la renaissance la somme des documens livrés au public est désormais amplement suffisante. La seule période dont il restât encore à populariser les souvenirs était celle qui s’ouvre avec le XVIe siècle pour finir avec le XVIIIe. Ces emprunts faits pour l’histoire ancienne du costume aux fresques ou aux miniatures des primitifs, il convenait d’en continuer la série, de les renouveler pour des époques plus rapprochées de nous, en mettant à

  1. Costumes historiques des douzième, treizième, quatorzième et quinzième siècles, Paris 1829-1830.