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LES
LIVRES DE RAISON
DE L’ANCIENNE FRANCE

I. Les Familles et la société en France avant la révolution, d’après des documens originaux, par M. Charles de Ribbe, 1873. — II. Histoire de la réserve héréditaire et de son influence morale et économique, par M. S. Boissonade, 1873.

L’ancienne France nous a légué un double trésor, intellectuel et moral, où nous pouvons puiser de grands exemples, d’utiles conseils, un sentiment de noble émulation et de dignité personnelle. Ce trésor s’exprime en une littérature dont l’abondance et la richesse ne sont égalées que par les deux grandes littératures de l’antiquité classique. On vante ce qu’il y a d’original et de spontané dans l’ancien génie grec : il semble n’avoir pas connu l’imitation; il a produit les différens genres littéraires selon les conditions naturelles d’une génération logique et conforme aux lois de la pensée humaine, la poésie lyrique en témoignage d’une jeunesse enthousiaste et religieuse, l’épopée comme expression d’une adolescence active sous le regard des dieux, le drame pendant un âge viril déjà soucieux des grands souvenirs, et ensuite la comédie, l’histoire, la philosophie, en signe de maturité réfléchie, avec le secours de la prose. Cette spontanéité, ce développement régulier et naturel, l’histoire de notre littérature les possède autant que cela est possible en des temps qui ne sont plus la jeunesse de l’humanité et chez un peuple dont les visibles liens de famille montrent la formation complexe. L’âge moderne du monde ne connaît plus le sol vierge des hauts sommets aux plantes extraordinaires et rares, mais il a de fécondes terres d’alluvion : la France est de toutes la plus riche. Ce qu’il y a de naturel et de sincère dans sa littérature, c’est qu’elle traduit un