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et leurs divisions sont accusées et augmentées par celles du genre de vie, des langues, des religions. On y trouve toutes les confessions chrétiennes, des orthodoxes, des arméniens, des catholiques, des protestans ; on y trouve toutes les croyances de l’Asie avec celles de l’Europe, et chacune avec ses sectes, juifs talmudistes et karaïmes, mahométans sunnites et chiites, bouddhistes, chamanites et païens de toute sorte. La seule énumération des diverses races de la Russie d’Europe est effrayante ; on n’en compte pas moins d’une vingtaine, et si l’on ne veut oublier aucun groupe, aucune peuplade, il faut doubler ou tripler ce chiffre.

Les Russes ont plusieurs cartes ethnographiques de leur patrie, et n’en ont pas une qui les satisfasse. Celle de M. de Kœppen paraissait excellente, et la Société géographique de Pétersbourg vient d’en entreprendre une nouvelle. Les Russes ont fait plus : dans le musée Dachkof, fondé à Moscou à l’occasion du congrès slave de 1867, ils ont essayé de donner une représentation à la fois scientifique et pittoresque, comme une carte vivante et animée des différentes populations de l’empire. A l’aide de mannequins de grandeur naturelle et de figures en cire sculptées par les meilleurs artistes d’après les moulages les plus exacts, on a réuni, dans toute la variété de leurs types et de leurs costumes, les peuples et les tribus de la Russie. Au nord de la vaste salle qui sert de carte se voient dans leurs vêtemens de peau de renne le Samoyède, qui rappelle l’Esquimau, et le Lapon, qui ressemble au Mongol. Au-dessous, à l’ouest, viennent le paysan finnois de la Finlande et le paysan esthonien des provinces baltiques, trahissant tous deux par leur face plate une lointaine parenté avec le Lapon et le Samoyède. A l’est sont les représentans des autres groupes de la race finnoise disséminés dans le bassin du Volga, du nord au sud de l’empire, et montrant des traits de moins en moins européens, de moins en moins nobles : des Permiens, des Votiaks, des Tcheremisses, des Mordvines et des Tchouvaches, au milieu desquels se distingue par sa beauté orientale une jeune Tatare de Kazan. En face, à l’occident, sont les paysans letton, samogitien et lithuanien, puis le Biélo-Russe, au visage carré, contrastant avec un marchand et un artisan juifs à la mine longue, au nez effilé. Au milieu de la salle, sur une large estrade, figure le maître de l’empire, le Grand-Russe, dans toute la diversité de ses métiers et de ses costumes provinciaux, — les hommes en lapti d’écorce ou en grandes bottes, avec la blouse rouge ou le long caftan, les femmes en riches sarafanes, avec des kokochniks en forme de diadème ou des potcheloks en forme de couronne. Au-dessous des Grands-Russes se tiennent les Petits-Russes, aux traits plus fins, aux vêtemens plus élégans, les hommes coiffés de hauts bonnets de peau de mouton, les jeunes filles de fleurs entrelacées de rubans. Derrière les Petits-Rus-