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Page:Revue des Deux Mondes - 1873 - tome 108.djvu/408

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a reçu, l’état pourrait consacrer près de 1 milliard, réparti en sept exercices, à élever les fortifications nécessaires à la sécurité du pays, à concourir aux œuvres que les conseils-généraux réclament et pour lesquelles ils s’imposeront à l’envi les plus grands sacrifices. Les avantages de cette mesure pour la Banque ne sont pas douteux : plus tôt elle sera rentrée dans ses avances ou plus le gage en sera assuré, et plus le crédit de ses billets rendra facile l’abrogation du cours forcé. Avec l’absence de toute prime sur l’or, avec la réserve de numéraire et l’habitude prise des petites coupures, il ne serait pas téméraire d’abolir le cours forcé après le paiement des deux ou trois premières fractions du nouvel emprunt.

L’émission de cette quantité de rentes entraînerait-elle quelque danger pour le crédit public, ferait-elle baisser le cours des valeurs, imposerait-elle à l’épargne des sacrifices au-dessus de ses forces ? Il n’y a pas lieu de le craindre. Une somme de 1 milliard 200 mil-liens, échelonnée en six paiemens semestriels, est loin d’atteindre une partie importante de l’épargne française, telle qu’elle se constitue dans des conditions normales d’activité et de sécurité. Avec la multiplicité des parties prenantes, il ne faut pas considérer les capitaux employés en achats de rente comme sérieusement immobilisés et en dehors de la circulation. Le titre d’emprunt fractionné par petites coupures est presque un instrument de crédit, une sorte de papier d’échange que l’on escompte, qui passe de mains en mains et sert à toutes les opérations industrielles et commerciales. A obtenir la même somme par l’emprunt ou par l’impôt, on peut dire au point de vue du présent que le premier moyen lèse moins que le second : ceux qui souscrivent à l’emprunt agissent volontairement, sans gêne, sans effort ; l’impôt au contraire, qui frappe brutalement tout le monde, prive souvent quelques-uns de ceux qui le paient d’instrumens de travail nécessaires : il paralyse, loin de fortifier.

Reste l’intérêt de l’état : sans aucun doute, dans le cas dont il s’agit, c’est en apparence faire un mauvais calcul que de consolider, en empruntant à 5 1/2, une dette qui ne demande que 1 pour 100 d’intérêt ; mais cette dette, il faudra toujours l’acquitter, et ce n’est à cet égard qu’une différence de deux ou trois ans. On nous dira : est-il bien juste de tant charger l’avenir au bénéfice du présent ? Il vaut peut-être mieux pour le budget actuel, à charge égale, employer les deux tiers de 200 millions en travaux d’utilité qu’en amortissement ; mais il n’est pas indifférent pour l’avenir d’augmenter la dette perpétuelle, qui s’élève déjà à 748 millions, d’une nouvelle somme de 64 millions Eh bien ! l’avenir ne serait-il pas appelé à recueillir par compensation les bénéfices de l’emploi du capital de cette rente ? Nous ne soutiendrons pas qu’en 1870, lorsque le chiffre de la dette perpétuelle ne s’élevait qu’à 363