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mais vous savez ce que c’est que leurs almanachs. Voilà notre promenade ajournée…

Adieu, écrivez-moi et dites-moi si les vôtres sont engagés dans la bagarre.


Paris, 22 mai 1852.

Notre promenade vous a-t-elle fatiguée ? Dites-moi vite que non. J’attendais un mot de vous aujourd’hui. Je suis confisqué par mon avocat, qui me plaît fort[1]. Il me semble homme d’esprit, point trop éloquent, et comprend l’affaire exactement comme moi. Cela me donne un peu d’espérance,


Mai 1852, mercredi à cinq heures.

Quinze jours de prison et mille francs d’amende ! Mon avocat a très bien parlé, les juges ont été très polis, je n’ai pas été nerveux du tout. En somme, je ne suis pas aussi mécontent que j’aurais le droit de l’être. Je n’en appelle pas.


27 mai 1852, au soir.

Vous êtes par ma foi d’un bon sel ! J’étais allé l’autre jour chez des magistrats, et j’avais eu l’imprudence d’avoir un billet de mille francs dans ma poche. Je ne l’ai plus retrouvé ; mais il est impossible que, chez des personnes d’un si haut mérite, il se glisse des coupeurs de bourse ; aussi le billet s’est évaporé de lui-même, n’y pensons plus. En même temps, j’ai eu le malheur de toucher un soi-disant pestiféré, et l’on a jugé prudent de me mettre en quarantaine pour quinze jours ; le grand malheur vraiment ! Mon ami M. Bocher va en prison à la fin de juin, nous nous y installerons ensemble. En attendant, j’ai grand besoin de vous voir ! — Mes vengeances ont déjà commencé. Mon ami Saulcy se trouvait hier chez des gens où l’on a parlé de l’arrêt qui me concerne ; là-dessus, sans consulter l’air du bureau, voilà mon canonnier qui, avec la discrétion de son arme, se lance à tort et à travers dans les grands mots de sottise, fatuité, stupidité, amour-propre de faquins, etc., prenant à témoin un monsieur en habit noir qu’il connaissait de vue, mais dont il ignorait la profession. Or c’était M. ***, un de mes juges, qui aurait préféré être ailleurs. Figurez-vous l’état de la maîtresse de la maison, des assistans, et enfin Saulcy, averti trop tard, qui tombe sur un canapé en crevant de rire, et disant : « Ma foi, je ne me dédis de rien ! »


Cannes, 22 janvier 1859, au soir.

Merveilleux clair de lune, pas un nuage, la mer unie comme une glace, point de vent. Il a fait chaud comme en juin de dix heures à

  1. M. Nogent Saint-Laurens. Il s’agit de l’affaire Libri.