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Dans les produits de luxe ou d’ornement, orfèvrerie, bijouterie, joaillerie, bronzes, meubles, tapis, tapisseries, faïences, décorations, la France est toujours et de très loin en avant de tous les autres pays de production. Il en est ainsi, on l’a vu, partout où l’art et le goût ont le dernier mot. A Vienne, cette supériorité ne s’est pas démentie, quoique les concurrens en présence fussent de premier ordre et eussent donné toute leur force. Certes l’exposition d’Elkington était plus considérable et plus riche, si l’on veut, que celle de Christofle; elle plaisait moins et n’offrait pas les mêmes nouveautés, les mêmes progrès dans la juxtaposition des métaux et dans leur alliance avec l’émail. Le joaillier anglais Hancock montrait, il est vrai, une curiosité qui n’avait point d’égale, la mise en vente, à raison de 2 millions 1/2, des diamans de l’impératrice Eugénie, et toutes les parures, au nombre de six ou de sept, de lady Dudley, pairesse d’Angleterre; mais ce sont là des bonnes fortunes ou des spéculations de marchands et point des titres d’industrie. La galerie abondait d’ailleurs en surprises de l’un à l’autre bout et en rapprochemens qui presque tous tournaient à notre avantage. La fabrique de Minton avait de grandes et belles pièces, des services de table bien réussis; mais tout près de là Deck lui répondait par une exposition exquise. Pour la céramique et la cristallerie, même duel et mêmes incidens : peu d’exposans et tous de choix, Sèvres en tête, donnant à admirer ses formes, sa pâte, ses dessins, ses couleurs. Rien ne pouvait lui être opposé, pas même la fabrique royale et impériale de Saxe, qui montrait à Vienne ses bergers de tradition et ses mièvreries d’étagères aux lignes droites, aux tons crus ou faux, aux angles disgracieux. Florence et Milan, Stoke-upon-Trent surtout, sont bien supérieurs à Meissen. Voilà pour la céramique; quant à la cristallerie, il y a peu à en dire. Nulle part on ne fait des glaces aussi grandes, aussi pures que celles de Saint-Gobain; mais Baccarat et Clichy devraient s’inquiéter de la Bohême, non de ses verres doubles et triples, qui sont sans usage, mais de ses cristaux blancs, qui sont admirables.

Ces articles de grand luxe sont en réalité ce qui a répandu le plus d’attrait sur l’exposition de Vienne, et ce qui devait rendre le plus de services à la ville, si les circonstances s’y fussent mieux prêtées. C’est à des envois de ce genre que l’industrie française s’était surtout attachée en les multipliant sous toutes les formes. Pas une de ses vitrines, et des plus modestes, qui ne représentât une valeur de plusieurs centaines de mille francs; quelques-unes allaient jusqu’au million. J’ai interrogé beaucoup d’exposans; ils m’ont tous donné des chiffres à peu près analogues. Il est vrai que les prix des objets venaient à l’appui de leurs déclarations, des tis-