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que sorte l’essence de la monarchie autrichienne. Les Tchèques s’abstiennent plus que jamais ; ils sont plus embarrassans par leur absence qu’ils ne le seraient par leur présence. Les fédéralistes, qui ont pour chef un ancien président du conseil, le comte Hohenwarth, refusent d’admettre la constitution de 1867. Les cléricaux se débattent contre les lois qui tendent à fortifier l’autorité de l’état dans l’ordre religieux, ils rêvent la résurrection du concordat. Tous ces partis ont leurs représentans, et, sans compter les Tchèques, dont la place reste vide, l’opposition arrive à près de cent voix. Le ministère Auersperg, qui représente un libéralisme modéré, qui s’inspire de la constitution de 1867, ne garde pas moins une majorité assez considérable, que lui ont assurée les élections dernières et qui s’est déjà manifestée dans les premières discussions de l’adresse. La nouveauté de ce Reichsrath, c’est la présence de quelques démocrates ou socialistes qui font leur apparition dans les assemblées autrichiennes. Ils sont une dizaine. Vienne, à l’instar de Paris, s’est donné le luxe de nommer sept radicaux sur douze députés. Ils peuvent, en certaines circonstances, porter leur contingent à l’opposition, ils ne sont pas près de devenir un parti bien sérieux et bien menaçant. La politique intérieure de l’Autriche ou plutôt de la Gisleithanie reste telle que l’a faite le ministère du prince Auersperg, libérale sans doute, mais assez disposée aussi à s’accommoder de tempéramens que la situation si compliquée des états autrichiens rend toujours si nécessaires.

À Berlin aussi le parlement vient de s’ouvrir, et, comme le Reichsrath d’Autriche, le Landtag de Prusse est le produit d’élections toutes récentes, qui ont eu lieu il y a moins d’un mois. Naturellement ces élections n’ont pu modifier d’une manière sensible les conditions générales de la politique prussienne. Une majorité considérable reste acquise au gouvernement. Ceux qui ont perdu le plus dans la dernière lutte électorale sont les vieux conservateurs, qui sont restés fidèles à l’ancienne politique prussienne, et qui ont refusé de suivre M. de Bismarck dans toutes ses évolutions. Ils faisaient jusqu’ici une figure assez respectable dans les chambres, ils pouvaient se faire compter ; ils ne sont plus maintenant qu’un petit nombre, la plupart sont restés sur le champ de bataille électoral. La majorité d’aujourd’hui, majorité singulièrement grossie par le dernier scrutin, se compose surtout de nationaux-libéraux qui, depuis les grands changemens de fortune de l’Allemagne et de la Prusse, se sont ralliés à M. de Bismarck, et qui par le fait sont désormais plus nationaux que libéraux. Avec les progressistes, qui font en certains cas quelques réserves théoriques, mais qui en définitive marchent du même pas, au risque de faire le plus souvent bon marché de toutes les garanties libérales, ils forment le gros de l’armée dont se sert l’impérieux chancelier. L’opposition de son côté ne laisse pas d’avoir eu quelques succès dans les élections ; sans cesser d’être une mi-