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de Paris ; ils pouvaient siéger et faire des rapports au grand-conseil, comme à celui des parties ; ce n’étaient donc pas seulement des administrateurs, c’étaient des magistrats, et leur commission portait qu’ils pouvaient, quand ils le jugeaient nécessaire, présider les tribunaux de bailliage, de sénéchaussée et autres. Dans le principe, au XVIe siècle, ils se présentaient même au parlement pour y rendre compte de leurs chevauchées, bien qu’ils remissent leurs rapports ou procès-verbaux au conseil privé ; mais plus tard le roi les dispensa de cette formalité, et ils ne relevèrent plus que du conseil d’état. Le parlement n’avait point à contrôler le choix que faisait le monarque de ses intendans ; la commission scellée du grand sceau qui leur était délivrée n’était soumise à l’enregistrement d’aucune cour, car la nature même de cette commission les plaçait au-dessus de toute cour de justice : ils étaient chargés en fait d’en surveiller les travaux. D’ailleurs une partie des affaires dont la connaissance leur était attribuée ne relevait plus des cours judiciaires. Presqu’à chaque nouvelle création fiscale ou autre, le roi ne manquait pas de statuer que les contestations et procès auxquels elle pourrait donner lieu seraient exclusivement portés devant les intendans et devant le conseil[1]. Les décisions prises par les première étaient ordinairement déclarées exécutoires tant que l’appel n’avait pas été reçu. Ainsi, à la fin du XVIIe siècle, ce fut non plus devant les trésoriers de France, mais devant les intendans que furent portées certaines contestations dont les premiers étaient d’abord seuls juges. Colbert enleva aux bureaux des finances, pour l’attribuer à ces mêmes intendans, la surveillance des travaux de routes, de ports et de canaux, en plaçant sous leurs ordres un directeur des finances auquel ce service était plus particulièrement attribué. Dès l’année 1643, on trouve les intendans en possession de juger en première instance toutes les affaires relatives aux tailles, aides, gabelles et autres impositions. « La seule difficulté, écrit M. R. Dareste, était de savoir si les appels de leurs sentences seraient portés au conseil d’état ou aux cours des aides. Un arrêt du conseil du 2 septembre 1643 trancha le conflit en faveur de ces dernières ; mais cette règle ne fut pas observée. » On comprend donc que les intendans prissent peu de souci des cours souveraines et ne connussent que la justice du conseil du roi. Cette justice, ils la dirigeaient eux-mêmes un peu à leur guise, car, ainsi que l’a remarqué M.

  1. C’est ce qui se produisît notamment lors de l’établissement de la capitation ; quoique cet impôt, analogue à la taille, rentrât naturellement dans la compétence des élections et des bureaux de finances, le roi ordonna que les contestations qui en pourraient naître seraient jugées dans les provinces par les intendans, et, à Paris seulement, par le prévôt des marchands et les échevins, sauf appel au conseil.