Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 1.djvu/864

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

accédât immédiatement à l’armistice proposé. Si Smyrne et Alexandrie ne sont pas compris dans le blocus avec le reste des ports ottomans, le sultan ne se départira pas de son obstination, et le mécontentement mutuel pourra bien dégénérer en hostilités. Si au contraire nous déclarions le blocus de tous les ports, il faudrait bien que le sultan cédât et souscrivît aux conditions qu’il nous conviendrait de lui imposer. M. Stratford Canning ne m’a pas donné connaissance de ses dernières communications avec le reïs-effendi. Il semble désireux de ne point s’expliquer avec moi sur l’état présent des affaires. Nos ministres en font autant. Tout, cela est peut-être très diplomatique, mais peu loyal, ce me semble. »

Si l’amiral Codrington croyait avoir quelque sujet de se plaindre des procédés du cabinet que présidait lord Goderich, successeur momentané de George Canning, il allait trouver des dispositions moins favorables encore dans le nouveau ministère que, le 8 janvier 1828, le duc de Wellington fut chargé de former. La session du parlement s’ouvrit, et le discours de la couronne qualifia d’événement malencontreux le combat qui venait de jeter l’Europe dans de si grandes perplexités. « Je ne mets pas en doute, écrivait à ce sujet l’amiral Codrington, qu’on ait agité la question de mon remplacement. En me sacrifiant, les ministres espéraient garder leurs places. Le généreux appui de notre illustre grand-amiral est venu me couvrir et les a préservés de l’humiliation qu’ils eussent encourue, si j’avais été enlevé à mon commandement. Des personnes de tous les partis ont donné des éloges à ma conduite dans la discussion qu’a soulevée au sein des deux chambres le mot malencontreux introduit dans le discours de la couronne. J’espère que cette expression fera plus de tort à ceux qui l’ont employée qu’à moi-même. Les ministres, je crois, ont voulu éviter d’irriter le sultan en m’accordant leur approbation. À mon avis, ils ont pris une fausse route. Il eût mieux valu se plaindre de l’agression des Turcs. Dans ce cas, l’événement n’eût pas été malencontreux ; il eût été assurément des plus heureux. Vous aurez vu du reste avec plaisir que le duc de Wellington avait déclaré que le traité serait exécuté dans toutes ses parties. Nous ferons de la besogne cet été, s’il y a dans les conseils de nos gouvernemens autant d’énergie que leur en montreront, j’espère, leurs amiraux. »

Le cabinet anglais n’était plus en communion d’idées avec le vaillant commandant en chef qui, sans se perdre dans les subtilités de la diplomatie, ne songeait qu’à recueillir les fruits de sa victoire. Lord Wellington s’était sensiblement rapproché de M. de Metternich ; il pensait, ainsi que cet homme d’état, qu’il fallait à tout prix éviter une attaque en commun contre les Turcs. Le prince, il est vrai reconnaissait lui-même qu’un retour vers l’état de choses qui existait