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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




28 février 1874.

La France est occupée depuis trois ans à résoudre le problème le plus difficile et le plus inexorable. Il s’agit pour elle de se relever, de reprendre son équilibre intérieur, de retrouver sa place et son rôle parmi les nations européennes. Elle le sait bien, si on l’oublie quelquefois pour elle. Ce n’est point l’affaire d’un jour ni même d’une année, c’est l’affaire de tous les jours, de toutes les heures et de bien des années. C’est une œuvre de temps, de patience, de raison prévoyante, de courageuse activité.

Le malheur a une certaine compensation pour ceux qui ont subi de grandes épreuves et qui savent porter leur fardeau ; il crée une situation douloureusement simple où tout se résume dans un mot : refaire par le travail et par la sagesse, sans illusion et sans découragement, ce que la guerre a défait par ses folies d’imprévoyance et d’infatuation. Quoi de plus simple aujourd’hui que notre politique extérieure ? Elle n’a pour le moment en vérité qu’à regarder, à se recueillir, sans se désintéresser assurément des affaires de l’Europe et surtout sans les ignorer, mais en sachant s’abstenir des interventions inutiles ou inopportunes, en évitant les fautes et en ayant au besoin la fermeté de réprimer les fantaisies de ceux qui seraient tentés de sortir d’une réserve qui est désormais un devoir national. Le danger le plus récent et le plus réel était né justement d’une de ces fantaisies, d’un excès de zèle clérical qui, en croyant servir l’intérêt religieux, avait fini par compromettre l’intérêt du pays ; il est heureusement passé, on peut le croire. M. de Bismarck a peut-être bien assez de batailler avec ses prélats sans songer sérieusement à entrer en guerre avec nos évêques. L’essentiel seulement serait de ne pas recommencer, de ne point exposer le pays et le gouvernement à payer les frais de pastorales peu réfléchies. Pour le reste, pour l’ensemble de la politique européenne, nous sommes un