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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 2.djvu/338

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phique qui soit au monde; enfin c’est encore à Karnak qu’a été découverte la stèle du même Toutmès III, dont le texte nous rapporte, dans un langage noble et poétique, les paroles du dieu de Thèbes, Ammon-Ra, au roi conquérant, et énumère ses principales victoires.

Mais c’est dans la ville des morts que s’accomplirent les plus grands travaux. A l’Assassif, on a fouillé des milliers de sépultures; c’est là qu’on a trouvé le cercueil en bois doré de la reine Aah-Hotep, mère d’Ahmès, qui a expulsé les pasteurs et fondé la XVIIIe dynastie. On se rappelle avoir vu, à Londres en 1862 et à Paris en 1867, les bijoux qui avaient été déposés sur la momie royale : le diadème d’or accosté de deux petits sphinx incrustés de lapis, le poignard, également en or incrusté de bronze noir et cloisonné d’émaux, ayant pour garde la tête d’Apis, le collier formé d’un fil d’or tressé sur lui-même à la façon de ces chaînes de Venise dont le secret est perdu, — les bracelets à fonds de lapis incrusté dans l’or, le naos ou broche pectorale, sans parler du miroir, de la hache d’or massif, du flabellum et de la barque symbolique portant le mort aux régions infernales. Ces produits d’un art merveilleux, quant aux procédés du moins, et qui datent de 3,300 ans environ, ne pourraient être exécutés aujourd’hui par l’orfèvrerie moderne, d’après ce qu’avouaient Froment Meurice et Castellani. Dans le quartier de Deir-el-Bahari, on a déblayé ce qui reste du temple d’Hatasou, dont les peintures nous ont rendu une page de l’histoire du nouvel empire : c’est l’expédition maritime entreprise, sous cette régente, fille de Toutmès Ier, au pays de Pount, c’est-à-dire en Arabie; on y voit retracés les moindres épisodes de cette conquête : la flotte traversant la Mer-Rouge, abordant en Arabie, les vainqueurs recevant la contribution de guerre; le lapis, l’ivoire, l’or, les sycomores, transportés en Égypte dans des corbeilles d’osier, et même des singes, destinés sans doute à l’amusement de la régente. C’est à Medineh-Tabou qu’ont été exécutés les plus grands déblaiemens. Les deux temples et le palais sont entièrement dégagés aujourd’hui; des tableaux et des textes religieux en grand nombre sont livrés à l’étude.

Entre Thèbes et Éléphantine, on rencontre sur la rive gauche du Nil le temple d’Esneh (Latopolis), qui appartient au plus bas temps, ayant été construit entre le règne de Philométor et celui de l’empereur Caracalla. Un peu plus loin, également sur la rive gauche, est le temple d’Edfou (Apollinopolis Magna), sur les terrasses duquel s’élevait naguère un village moderne, aujourd’hui détruit par Mariette-Bey, qui a déblayé en entier ce splendide édifice, le spécimen le mieux conservé et le plus complet que nous possédions des temples égyptiens. Rien n’y manque : les pilônes, l’enceinte, le