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ÉCRIVAINS CONTEMPORAINS

M. VITET, SA VIE ET SES ŒUVRES.

Il y a quatre ans à peine, pendant quatre mois, du 15 octobre 1870 au 31 janvier 1871, la Revue a publié sept lettres adressant d’ardens appels au patriotisme parisien pour l’exhorter à supporter, à braver les périls et les souffrances du siège prussien. « Je supplie Paris, disait l’écrivain, de tenir ferme jusqu’au bout. C’est, avant tout, pour la question d’honneur, car j’ai la bonhomie, je l’avoue, de croire encore à ce vieux mot, et d’être pris d’une douleur profonde devant l’abaissement de mon pays. Ce ne sont pas là des phrases, n’en déplaise à nos pacifiques. Pour les nations, aussi bien que pour l’individu, l’honneur c’est la vie même, la première des réalités. Je voudrais bien les voir, ces raffinés, ces sybarites, devenus citoyens d’un peuple qui tout à coup perdrait le sentiment de sa force et de sa dignité; quelle chute, même pour eux ! Que seraient-ils et que serions-nous tous? Mais quand je supplie Paris de tenir ferme jusqu’au bout, ce n’est pas seulement l’honneur qui me préoccupe; j’entends aussi servir nos intérêts. Si vous voulez que l’ennemi n’abuse pas de sa victoire, qu’il ne vous dépouille pas, ne vous pressure pas sans pitié, ne lui laissez pas voir, pas même deviner que vous mourez d’envie de n’être plus en guerre. Vous n’avez qu’un moyen de gagner quelque chose avec lui, c’est de le faire attendre. Il vous surfait, ne cédez pas. Persuadez-le que vous subirez tout, dangers et privations, aussi longtemps qu’il ne sera pas traitable et modéré. »

Qui donnait ces énergiques conseils? qui les signait de son nom? était-ce un guerrier vieilli dans les camps, ou un politique consommé et affermi dans les épreuves de la vie? Non, c’était un aca-