fois engagé dans ce sentier, il n’y avait pas de raison pour ne point aller jusqu’au bout. Le capitaine, le lieutenant et l’enseigne finirent par se trouver également incapables de conduire le navire qu’on leur avait imprudemment confié; ils se cotisèrent alors pour entretenir à leurs frais un quatrième officier qui leur pût apprendre ce qu’ils avaient à faire « dans les occurrences. »
Le service de Dieu ne pouvait être négligé dans un règlement préparé par les ordres d’un prince de l’église. Ce que Richelieu demandait surtout au chapelain, c’était d’être « homme de bonne vie et de bon exemple, » d’instruire l’équipage « par ses actions tout autant que par ses paroles. »
Le chirurgien devait, avant de quitter le port, faire garnir son coffre « de scies et de crochets, d’onguens, d’huiles de lis, de rose et de camomille, de thériaque, de rhubarbe, de séné, de poudres céphaliques, — myrrhe, encens, mastic et limon. » — Pendant le combat, il se tenait dans la cale, au pied du grand mât, « ses fers au feu, ses emplâtres et ses ligatures rangées autour de lui. » C’est là qu’il attendait les blessés, prêt à cautériser les chairs vives, à lier les artères, à répandre sur les plaies saignantes ce fameux « astringent » dans la composition duquel on avait fait entrer, avec le poil de lièvre, la cendre de crâne humain. Le chirurgien ne faisait office de médecin qu’en cas de nécessité, et encore lui était-il prescrit « de ne pas rançonner les malades. » Les escadres un peu nombreuses étaient généralement suivies d’un ou de deux navires-hôpitaux. Là seulement se trouvait représentée d’une façon digne d’elle la savante faculté. Le chirurgien et son barbier, si un médecin se fût par hasard rencontré sur le vaisseau qu’ils montaient, n’auraient eu « qu’à suivre son avis et à garder de point en point ses ordonnances. » Livrés à leurs propres lumières, ils ne pouvaient donner aux malades que l’assistance qu’ils tiraient de leur coffre et les rafraîchissemens qu’ils réussissaient quelquefois à obtenir de la libéralité du capitaine.
Le capitaine était chargé de la fourniture des vivres et du paiement de la solde; il recevait à cet effet pour chaque homme embarqué 10 écus par mois. Les autres dépenses ne le concernaient pas. L’écrivain seul était comptable de tout ce qui s’embarquait et de tout ce qui se consommait à bord du vaisseau ; pendant le combat, il présidait au passage des poudres, non-seulement « pour y empêcher le désordre, » mais aussi « pour écrire les coups de canon qui étaient tirés[1]. » Les fraudes en tout genre étaient à cette
- ↑ Je m’explique maintenant comment le commissaire se rencontre à un poste qui ne semblait pas appeler spécialement l’intervention de l’officier comptable.