qu’à se tenir ferme, on lui déclare qu’il ne fera pas plus longtemps des dupes, et le maréchal lui-même est fort menacé de n’être plus considéré d’ici à peu que comme un radical déguisé, comme un simple précurseur d’une commune nouvelle !
Que parmi les légitimistes il y ait des esprits sensés qui se résignent à la nécessité des choses, à ce qu’ils ne peuvent empêcher, qui acceptent le septennat après l’avoir voté, oui assurément, il y en a. Il ne faut pas s’y tromper cependant, il y a une terrible logique dans ces opinions absolues. Les modérés suivent les violens, et les différences sont souvent dans le langage, dans le tempérament, bien plus que dans la pensée et dans les conclusions définitives. M. Dahirel veut en finir au plus vite, sans s’inquiéter du vote du 20 novembre 1873. M, Cazenove de Pradines a rêvé pour M. le maréchal de Mac-Mahon le rôle d’un gardien prêt à ouvrir les portes et à remettre les clés de la citadelle au « roi de France, » s’il se présente. Hier encore M. de Kerdrel, qui combattait l’autre jour l’urgence pour la proposition Dahirel, qui semblait jusqu’à un certain point reconnaître l’autorité du septennat, M. de Kerdrel, dans la commission des trente, appelait le septennat un vestibule, — « un vestibule où il n’y a rien à construire ! » Tout cela se ressemble étrangement. Admettons un instant, si l’on veut, que les légitimistes aient le droit de garder l’espérance et la volonté de rétablir le roi. Jusque-là, ils ont la liberté de leurs convictions et de leurs sentimens ; mais peuvent-ils songer à rappeler leur roi ? Aperçoivent-ils quelque chance favorable après tout ce qui s’est passé ? S’ils peuvent restaurer la monarchie, que ne le font-ils, au lieu de tant parler et de se plaindre de tout le monde ? Et si, ne le pouvant pas, ils s’obstinent à empêcher ce qui serait possible, à refuser au pays toute organisation, à retenir la France dans un a vestibule » où l’on ne doit rien construire, s’ils cèdent en un mot à cette préoccupation unique, exclusive, de laisser une place vide pour réserver à leur cause le bénéfice incertain, hypothétique de l’imprévu, c’est donc qu’ils subordonnent tous les intérêts nationaux à un misérable calcul de parti ! Ils sont plus légitimistes que conservateurs, de même que d’autres sont plus bonapartistes que conservateurs, en s’efforçant, eux aussi, de tenir tout en suspens, de faire croire à l’impossibilité de créer un régime régulier en dehors de leurs combinaisons. C’est l’éternelle histoire, c’est la moralité de ces campagnes conduites par l’esprit de parti.
Et maintenant le ministère voit-il le danger de cette équivoque qui fait sa faiblesse, qui pèse sur lui comme sur le pays et qu’on l’a souvent sollicité de dissiper dans son intérêt comme dans l’intérêt public ? L’équivoque, elle est dans cette situation où le gouvernement est obligé de compter avec ceux qui lui refusent jusqu’aux moyens de s’organiser et de s’affermir, jusqu’au droit de vivre, de telle sorte qu’il flotte inces-