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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 4.djvu/13

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et les événemens politiques qui ont amené la guerre dont nous offrons ici le récit ; mais, dans un temps où les malheurs de la patrie donnent une importance particulière à toutes les questions d’organisation militaire, il nous a semblé que ce récit ne paraîtrait pas complet, si nous ne commencions par montrer au lecteur avec quelques détails les ressources des deux adversaires, la manière dont ils les mirent en œuvre, les services rendus à tous les deux par un corps d’officiers réguliers, instruits, nourris de bonnes, traditions, et enfin la formation des grandes armées improvisées qui soutinrent cette longue guerre. Ce tableau préliminaire fera voir comment ces armées, se trouvant des deux côtés dans des conditions analogues, purent s’organiser et acquérir peu à peu les qualités militaires sans être exposées aux désastres que l’une comme l’autre aurait éprouvés, si dès le début elle avait eu à combattre des troupes aguerries et disciplinées.

Il nous faut donc d’abord faire voir dans une rapide esquisse ce qu’était l’armée américaine avant 1861. Quoique les Américains ne fussent pas un peuple militaire, ils avaient eu l’occasion de montrer certaines qualités guerrières. Dans leur courte histoire, ils avaient déjà des précédens pour l’organisation de leurs forces nationales, et un petit groupe d’hommes braves et dévoués préservait de l’oubli les traditions acquises dans des campagnes peu brillantes, mais instructives.

Sans nous arrêter longuement aux guerres où le soldat américain figura avant 1861, il est nécessaire d’en dire quelques mots. On comprendra mieux le mouvement remarquable qui créa de grandes armées au premier bruit de la guerre civile lorsqu’on aura vu comment se sont formés des corps de volontaires à d’autres époques de l’histoire de la jeune république. Après avoir suivi la petite année régulière dans le far-west et au Mexique, on s’expliquera son rôle dans la grande organisation militaire des fédéraux et des confédérés.

C’est contre nos soldats, dans la guerre de sept ans, que les volontaires américains, alors miliciens d’une colonie anglaise, firent leurs premières armes. On peut le rappeler non-seulement sans amertume, puisque, Dieu merci, le drapeau des États-Unis, depuis qu’il flotte, ne s’est jamais trouvé opposé sur les champs de bataille à celui de la France, mais encore comme un souvenir qui fait un lien de plus entre eux et nous, car, dans la lutte inégale qui décida de la possession du nouveau continent, ces miliciens reçurent d’utiles leçons en se mesurant avec la poignée d’hommes héroïques qui défendaient notre empire d’outre-mer en dépit d’une oublieuse patrie.

Les soldats de la guerre de l’indépendance se formèrent à cette école. Montcalm, plus encore que Wolf, fut l’instructeur de ces adversaires,