Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 4.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
229
REVUE. — CHRONIQUE.

naissant après tout en politique d’autre loi que la souveraineté nationale, d’autre règle de conduite que le sentiment de ce qui est juste et profitable au pays sans doute, et aussi de ce qui est possible. Le centre droit a travaillé de tous ses efforts au succès d’une restauration monarchique qu’il croyait réalisable et avantageuse pour la France ; il n’a pas réussi. Il est resté dans son rôle ; par les réserves mêmes qu’il n’a cessé de porter dans sa coopération à la campagne de l’an dernier, il a fait ce qu’il a pu pour sauvegarder l’avenir possible de la monarchie constitutionnelle, qui demeure un grand système de gouvernement avec ses principes, ses conditions et son drapeau. Le jour où la France croira qu’elle peut se faire de cette monarchie constitutionnelle un abri protecteur, efficace, elle la trouvera sans se désavouer, sans avoir à renoncer aux plus inviolables traditions de son existence moderne. Maintenant ce n’est point évidemment de cela qu’il s’agit. Le centre droit serait le premier à juger chimérique toute tentative nouvelle pour le rétablissement de la monarchie, et les effervescences de l’extrême droite ne seraient pas de nature à la convertir à l’urgence d’une campagne sous le drapeau blanc, La question n’est donc plus là ; elle est dans cette nécessité immédiate d’organisation qui frappe aujourd’hui tout le monde, que le centre droit lui-même reconnaît, à laquelle M. le duc de Broglie se proposait de faire honneur à sa manière par son projet de grand-conseil, qui a été un moment l’inspiration du ministère prêt à se former il y a six semaines. Or, si les choses en sont là, si la monarchie est impossible, si, comme cela est certain, on ne veut pas laisser se prolonger une situation indéfinie qui ne peut favoriser que les passions révolutionnaires et les revendications césariennes, tout se réduit à savoir dans quelles conditions peut se réaliser le plus utilement cette organisation, qui rallie désormais assez d’esprits et de groupes modérés pour qu’elle ne reste plus un problème insoluble.

Au fond, que veut le centre droit ? qu’admet-il dès ce moment ? Il reconnaît la nécessité d’organiser les pouvoirs de M. le maréchal de Mac-Mahon sous le titre de président de la république. Il admet les deux chambres, cela va sans dire. Il ne refuse pas aux deux chambres réunies le droit de nommer un nouveau président en cas de vacance du pouvoir, ou de réviser dans sept ans les lois constitutionnelles en s’inspirant de la situation du pays. Dès lors, si l’on veut voir les choses comme elles sont, où est l’incompatibilité entre ces combinaisons et celles qui sont résumées dans la proposition de M, Casimir Perier ? La proposition du centre gauche, c’est un peu trop la république, assure-t-on, c’est un pas désagréable à franchir. Et après ? Est-ce que la république n’existe pas ? est-ce qu’elle n’avait pas hier encore M. de Larochefoucauld pour ambassadeur à Londres ? C’est la république telle que l’entend M. le comte de Montalivet, dans cette lettre honnêtement libérale qu’il adressait récemment à M. Casimir Perier et qui a