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SIR ROBERT PEEL
D’APRES DES SOUVENIRS PERSONNELS ET DES PAPIERS INEDITS.


I.

Dans une modeste église paroissiale de la Grande-Bretagne se trouve un tombeau assez simple portant l’inscription suivante : «à celui auquel l’Angleterre a dressé tant de statues, ses enfans ont élevé ce monument de leur dévoûment filial et de leurs regrets éternels. » Quel est ce personnage honoré et pleuré non moins par son pays que par sa famille? Nous ne nous proposons nullement de composer un essai sur sir Robert Peel : sa vie est suffisamment connue. Déjà ici même des études remarquables en ont mis en relief les traits principaux ; avec plus de suite et de développemens, sa biographie entière y a été retracée par une main digne entre toutes d’en consacrer le souvenir impérissable, — par M. Guizot lui-même. Nous n’avons garde de chercher à compléter l’œuvre de cet illustre homme d’état; mais, les circonstances nous ayant permis d’approcher le célèbre chef parlementaire anglais durant les vicissitudes diverses de sa carrière, nous avons pensé que les souvenirs personnels ainsi recueillis ne seraient point sans quelque intérêt pour le public contemporain.

Né le 5 février 1788, Robert Peel, sans appartenir à la puissante aristocratie de son pays, trouva sa place marquée à l’avance dans la vie parlementaire et dans la vie politique. Issu d’une respectable famille bourgeoise, son grand-père avait amassé, dans la fabrication des cotonnades, une fortune immense qui devint colossale sous la vigilante administration de son père, le premier sir Robert Peel. Celui-ci siégea au parlement comme représentant de la petite ville de Tamworth, qui depuis cette époque y a constamment envoyé le père, le fils et le petit-fils, et il eut assez de crédit pour faire entrer