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800 millions en 1863, et que dorénavant on ne devra plus craindre d’augmenter la circulation fiduciaire plutôt que de trop élever le prix de l’argent, ceux-là se tromperaient complètement et prendraient un mirage pour la réalité.

En fait de circulation fiduciaire, il n’y a pas de chiffre qui soit sacramentel. Tout dépend des circonstances, c’est là l’enseignement qui est fourni par notre pays. Quand on a le change contre soi pour une raison ou pour une autre, soit parce qu’on s’est livré à des spéculations excessives, ainsi que nous l’avions fait en 1857 et en 1863, soit parce qu’on est débiteur à l’étranger par suite d’emprunts et autres opérations financières comme l’Italie, l’Autriche, la Russie et les États-Unis, on doit être très circonspect dans l’émission du papier-monnaie. Le véritable criterium, c’est, comme l’a fort bien dit le Bullion’s report de 1810, le taux du change, c’est lui qui marque la limite qu’on ne peut pas dépasser.

En 1857, en France, avec 600 millions, en 1863 avec 800, on était arrivé à cette limite; si on avait voulu la franchir, on eût été bien vite obligé de suspendre les paiemens, et le papier se serait déprécié. C’est en vain qu’on proposait pour remédier à la situation de donner plus de garantie aux billets en augmentant le capital de notre principal établissement financier, ou en l’obligeant à acheter des métaux précieux pour une somme plus ou moins considérable; ces moyens étaient empiriques et n’auraient remédié à rien. Les garanties supplémentaires de la Banque n’auraient pas corrigé le change, n’auraient pas fait qu’on se serait contenté de billets lorsqu’on avait besoin de numéraire, et, quant au projet d’acheter des métaux précieux, c’était chercher à remplir un vase qui fuyait. L’or et l’argent qu’on se serait ainsi procurés auraient disparu bien vite, et la crise se serait aggravée par l’illusion qu’ils auraient fait naître. Il n’y avait absolument d’efficace que l’élévation du taux de l’escompte. Malheureusement on n’est pas encore arrivé dans notre pays à reconnaître cette vérité. Déjà, lorsqu’il y a encore 2 milliards 1/2 de papier en circulation, beaucoup de personnes se récrient contre la cherté du taux de l’intérêt. Il était naguère à 5 pour 100, on a dû l’abaisser à 4; on voudra peut-être qu’on le diminue encore. Ce serait, selon nous, une grande faute d’y consentir. On comprend qu’on maintienne le cours forcé, il serait déraisonnable de le supprimer tant que la dette de l’état vis-à-vis de la Banque ne sera pas sensiblement diminuée; mais le corollaire indispensable du cours forcé, c’est l’escompte à un taux plus élevé que si l’on était dans des conditions normales. Quand la circulation fiduciaire est convertible à volonté, on peut se rendre compte dans une certaine mesure de la situation commerciale et financière par les demandes de remboursement. Si ces demandes ne se produisent pas, on est en droit d’abaisser