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Page:Revue des Deux Mondes - 1874 - tome 4.djvu/490

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de ces derniers. Dès ce moment, toutes leurs armées furent accompagnées d’un grand nombre de ces animaux. Lorsqu’au début de la première guerre punique Hannon débarqua en Sicile pour essayer de faire lever le siège d’Agrigente, il amenait avec lui 60 éléphans, qui furent presque tous tués ou pris par les Romains. Quelques années après, Xanthippe mettait en ligne 100 éléphans dans cette bataille où l’armée de Régulus fut anéantie, et c’est au concours des éléphans qu’il dut en grande partie la victoire. Par contre, c’est à l’encombrement produit sur un terrain trop étroit par ces auxiliaires aux corps énormes qu’Annibal dut, cinq ans plus tard, de voir son armée anéantie à Palerme : 104 éléphans tombèrent au pouvoir des Romains et ornèrent le triomphe du proconsul Métellus. Peu après, dans la guerre que Carthage eut à soutenir contre les mercenaires licenciés, elle eût vraisemblablement succombé sans le secours qu’elle tira de ses éléphans. Ces animaux jouèrent également un rôle important dans la seconde guerre punique. Asdrubal en avait 200 en Espagne. Annibal en prit une quarantaine avec lui lorsqu’il quitta ce dernier pays pour se diriger vers l’Italie. Ces éléphans traversèrent les Alpes avec le reste de son armée, et ce ne fut pas une des moindres difficultés de ce passage célèbre de mener ces animaux à travers la neige et les glaciers, par des chemins étroits et escarpés. La rigueur du climat fit perdre à Annibal une partie de ses éléphans comme de ses chevaux et de ses hommes ; mais il put en sauver un certain nombre, qui prirent part à la bataille de la Trébie. A Trasimène et à Cannes, Annibal n’avait plus d’éléphans. Plus tard, il en reçut d’Afrique en même temps qu’un renfort de nouvelles troupes. Cela ne l’empêcha pas d’être finalement défait et forcé d’abandonner l’Italie, comme Asdrubal était forcé d’abandonner l’Espagne. La bataille de Zama mit bientôt fin à la fortune de Carthage. Dans le traité qu’ils subirent alors, les Carthaginois durent livrer aux vainqueurs les éléphans qui leur restaient, et promettre de ne plus en entretenir dans l’avenir.

Jusque-là, les Romains s’étaient contentés de combattre les éléphans de leurs ennemis, sans en entretenir eux-mêmes dans leur armée. Il leur était pourtant facile de retourner contre Pyrrhus et contre les Carthaginois ceux qu’ils avaient faits prisonniers. S’ils hésitèrent longtemps à recourir à ces monstrueux auxiliaires, c’est sans doute dans la crainte d’affaiblir le moral des soldats en mettant leur confiance ailleurs que dans leur propre courage. C’est pour le même motif qu’ils ne firent jamais usage de chars armés de faux. Pendant longtemps ils ne s’occupèrent que de neutraliser l’action des éléphans ennemis. A la fin pourtant, ils adoptèrent cette machine de guerre, et dans la troisième guerre punique, — où les Carthaginois n’avaient plus d’éléphans, — ils menèrent contre