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mais des renforts d’hommes arrivaient incessamment du train de siège. Un peu avant une heure de l’après-midi, il devint tout à fait évident que les Russes ne continuaient la canonnade que pour couvrir la retraite de leur infanterie. L’avantage de la journée était en grande partie dû à l’action de ces canons de 18, que des officiers supérieurs d’artillerie avaient d’abord déclaré impossible d’amener sur le champ de bataille. « Ces pièces, dit l’officier anglais que nous suivons dans ce récit, ces pièces firent tourner la bataille en faveur des alliés, en forçant l’ennemi à se retirer avec des pertes énormes[1]

Pendant le siège de Paris, lorsqu’on occupa le plateau d’Avron dans la nuit du 28 au 29 novembre 1870, en vue d’appuyer le mouvement que l’on allait tenter sur la Marne, on y amena six pièces de 24 court et six pièces de marine de 30. Le sol de la route et celui des terrains du plateau était sec, et le transport put se faire sans trop de difficultés, quoique la pente fût par endroits assez raide. Bien que le succès n’ait pas récompensé nos efforts, il faut reconnaître que ces pièces furent d’un grand secours. « Il est certain, dit le général Vinoy dans son Histoire du siège de Paris, que, le jour de la bataille du 2 décembre, les batteries placées sur le plateau ont influé très sérieusement, par la puissance et la précision de leur tir, sur le résultat de la journée. » Lors de l’évacuation du plateau, les difficultés de transport furent rendues plus grandes par le mauvais état des chemins. « Une lourde pièce de marine, dit le général Vinoy, entraîna dans la pente glissante qui conduit à Neuilly-Plaisance la voiture et les chevaux qui la transportaient, et alla rouler avec eux dans un ravin. » Une autre pièce fut versée en cage, obstrua le passage et arrêta pendant quelque temps le mouvement de retraite. Il fallut laisser sur place deux pièces, une de 24 et une de 30, qu’on vint rechercher la nuit suivante. Avec quelques attelages d’éléphans, l’enlèvement des grosses pièces se fût opéré sans difficultés et avec promptitude, et ces animaux auraient avec leurs trompes retourné les pièces encagées, comme ils font dans les marches de l’armée anglaise aux Indes. On a encore employé trois pièces de fort calibre dans d’autres circonstances du siège de Paris. Un officier de marine, M. Lavison, avait inventé un affût qui permettait de transporter cette sorte de pièces avec plus d’aisance et de rapidité. Ce système a été appliqué à trois pièces de 16 centimètres, dont on forma une demi-batterie de réserve qui a rendu « de très utiles services, » selon les expressions de M. le vice-amiral La Roncière Le Noury.

Ces exemples ne prouvent-ils pas qu’il pourrait être avantageux d’ajouter à notre artillerie de campagne, comme dernière réserve,

  1. Letters from head-quarters, by an officer of the staff. London 1859.