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la France, l’Angleterre, la Belgique, l’Allemagne, la Hollande, la Suisse, l’Italie, le problème d’enrichir les peuples avec l’aide du temps, ou d’en rétablir la richesse amoindrie par quelque cataclysme, comme celui dont notre malheureuse patrie est la victime, se résout de la manière suivante : dans de tels pays, on trouve, pour peupler et animer les ateliers et les chantiers des villes et des campagnes, pour s’enfoncer dans les mines, et pour se lancer sur la surface agitée des mers, une population adonnée au travail par goût et par habitude, familière avec la pratique des métiers. Pour diriger les masses populaires, ces contrées offrent des chefs laborieux eux-mêmes et capables, des ingénieurs nombreux, de toutes les spécialités, joignant la pratique aux connaissances scientifiques. Tous, ouvriers, patrons, ingénieurs, contre-maîtres, ont l’esprit rempli constamment d’une pensée, celle d’utiliser leurs facultés, leur science, leur acquis et leurs capitaux à produire honnêtement de la richesse. En présence de ces élémens de production et de ces forces productives, la tâche du gouvernement aujourd’hui n’est pas très ardue ni très complexe. Elle consiste en effet à laisser libres les chefs d’industrie dans l’exercice de plus en plus parfait de leur profession, à supprimer ou tout au moins à diminuer les obstacles législatifs ou réglementaires qui les entraveraient dans leurs efforts progressifs. Il doit réviser les lois qui leur interdiraient de puiser au dehors aussi bien qu’au dedans soit les matières nécessaires à leur fabrication, soit les ustensiles, outils, machines et appareils pouvant y servir. Il doit abolir les droits de douane et les formalités qui gêneraient l’importation des unes et des autres. Il convient qu’il ouvre de plus en plus la porte aux produits définitivement fabriqués ou préparés; c’est la meilleure méthode, la seule efficace pour stimuler incessamment les chefs d’industrie et pour les contraindre à ne négliger aucun des perfectionnemens imaginés par l’étranger, aucun moyen d’accroître leur propre puissance productive, et à en faire partager le bénéfice au consommateur. De cette manière, à une quantité déterminée de labeur humain répond une quantité toujours plus grande de produits, c’est-à-dire de richesse. Chaque jour, pour ainsi dire, ajoutant à la supériorité des procédés et à l’étendue de la production par tête de producteur, c’est ainsi qu’un grand pays peut, sans qu’il y faille à beaucoup près des siècles, réparer les pertes qu’il aurait subies, fussent-elles énormes, ou subvenir par des impôts tolérables à la dépense de vastes entreprises que la nécessité lui imposerait, telles que seraient par exemple celles dont la France sent le besoin de s’occuper aujourd’hui, à savoir un nouvel et vaste développement des voies de communication par terre et par eau, l’acquisition d’un matériel tout neuf de guerre pour de grandes armées, ou l’établissement d’un