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et la Hongrie en Autriche, elles voulaient conserver leur autonomie complète et ainsi elles refusaient de se soumettre en rien aux décisions d’une assemblée centrale.

De 1585 à 1593, les états-généraux se réunirent fréquemment afin de pourvoir aux besoins de la guerre. Les affaires devenant de plus en plus nombreuses et surtout urgentes, à partir de cette année ils siégèrent en permanence et fixèrent le lieu de leur réunion à La Haye. Chaque province n’avait qu’une voix, mais elle pouvait se faire représenter par autant de députés qu’elle le jugeait bon, à la condition de les rétribuer[1]. Généralement la Gueldre envoyait 18 députés, la Hollande 5 ou 6, la Zélande à ou 5, Utrecht 3, Overyssel 12, Groningue 6. Les députés s’asseyaient autour d’une grande table suivant le rang de leur province, mais chaque province ne pouvait disposer que de six chaises. Les députés qui excédaient ce nombre devaient se tenir debout. Sauf quelques membres nommés à vie, les autres l’étaient pour trois ou six ans. Le conseiller pensionnaire de Hollande assistait tous les jours à la réunion. Comme il prenait la parole au nom de la Hollande, qui était l’état prépondérant, il exerçait dans la plupart des affaires une influence décisive. Olden Barneveld, Jan de Witt et Heinsius exercèrent le pouvoir d’un ministre dirigeant, sans en avoir ni le titre ni les attributions. Voici un fait qui donnera une idée de l’importance de ce personnage. En 1609, Olden Barneveld étant malade, l’envoyé anglais écrit à la cour : « Les états cessent de se réunir, et toutes les affaires sont arrêtées[2]. »

Par une mesure en date de 1624 dont, on ne peut assez louer la sagesse et la prévoyance, tous les militaires étaient exclus de l’assemblée des états. Le capitaine-général lui-même, qui commandait toutes les forces de terre de la république, n’était pas excepté. Il pouvait seulement faire des propositions au sein de l’assemblée, mais il devait se retirer dès que commençait la délibération. Les Anglais et les Hollandais ont compris de bonne heure que la liberté est toujours exposée à périr de la main de celui qui dispose de la force armée, et il n’est pas de précautions qu’ils n’aient prises pour parer à ce péril. Ainsi dans les Pays-Bas le commandant en chef ne pouvait déplacer les troupes sans l’assentiment des états-généraux. Il ne pouvait ni les faire entrer dans une province ni les en faire sortir contrairement à la volonté des états provinciaux. En temps de guerre, les états-généraux déléguaient toujours deux ou trois de

  1. Les députés de Hollande touchaient 4 florins et ceux des autres provinces 6 florins. Le florin valait un peu plus de 2 francs; mais, comme on le sait, la puissance d’acquisition de l’argent était plus que double de ce qu’elle est aujourd’hui.
  2. In the mean lime the States assemble not, and all business how urgent do ever stands at stay. Minnood Papers, III, p. 62.