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la location pour ainsi dire de la terre qui appartient selon la loi turque à l’état, parce qu’elle appartient à Dieu, mais la véritable propriété du sol, transmissible par vente ou par succession.

L’industrie ne semble pas en meilleure voie que l’agriculture ; le peu de développement des chemins de fer le démontre. L’état a construit en Asie 234 kilomètres de chemins de fer et en Europe 625, avec une dépense moyenne de 250,000 francs par kilomètre. Cette création, qui représente 215 millions de dépenses, est l’œuvre des quatre dernières années ; mais dans le même espace de temps la Turquie a emprunté sept fois cette somme et ne l’a pas employée toute en dépenses utiles. Dans les autres pays, l’ouverture des chemins de fer donne une grande impulsion à l’industrie intérieure métallurgique, minière ou autre : c’est à l’étranger que la Porte s’est adressée pour toutes les fournitures des chemins de fer, de même que pour cette fabrication des armes qui a entraîné de si grosses dépenses dans les derniers exercices. Le peu de rendement des droits sur les objets fabriqués prouve surabondamment l’atonie industrielle et commerciale. Comment en pourrait-il être autrement dans un pays qui, malgré sa situation privilégiée, possédant 1,100 lieues de côtes marines, n’a pas de routes pour aboutir aux ports, pas de vaisseaux même pour le cabotage, encore moins pour la grande navigation, et avec une population de 40 millions d’âmes ne peut établir une recette bien assise de plus de 560 millions de francs ?

Ces détails au sujet des revenus de la Turquie suffisent assurément pour montrer quelle marge ils laissent à la progression : nous ne pourrons être aussi explicites au sujet des dépenses. La commission chargée de l’examen du dernier budget s’est abstenue sur ce point de toute remarque ; elle n’a ni vérifié ni critiqué les dépenses, elle s’est bornée à recommander l’économie afin de rétablir l’équilibre et de donner une base sérieuse à l’espoir du remboursement de la dette flottante. En dix ans, les dépenses de la Turquie, d’après les budgets publiés, se sont élevées de 326 millions à 557, sur lesquels les intérêts de la dette entrent pour 212, non compris le service à faire du nouvel emprunt 5 pour 100, les dotations pour AS, les services ministériels pour le surplus ; celui de la guerre en réclame seul plus de 90, celui des travaux publics n’en obtient pas 45. Le ministère de l’instruction publique se contente d’une somme inférieure à 3 millions de francs,

À côté des chiffres officiels, de ce qu’on peut appeler l’histoire écrite du gouvernement impérial, ce qui instruirait plus sûrement sur l’étendue des ressources et la progression des dépenses, ce seraient les mémoires secrets des financiers accrédités auprès de la Sublime-Porte, la nomenclature des procédés mis en œuvre pour parer aux besoins momentanés ; toutefois la liste des emprunts suffit à en