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sceaux fournissent à l’histoire des arts ; je signalerai les indications les plus curieuses qu’on a pu tirer de ces monumens pour compléter ce que les chroniques et les chartes nous apprennent de la vie, des mœurs et des habitudes pendant ce moyen âge qui est déjà si loin de nous et dont pourtant nous foulons à chaque pas les débris.


I

L’usage d’apposer en signe d’attestation l’empreinte de son anneau sur des objets qu’on veut personnellement consacrer, sur des actes et des lettres émanés de soi, remonte à la plus haute antiquité. Dans la Bible, il est dit que Jézabel marqua des lettres avec l’anneau du roi d’Israël Achab pour faire croire aux habitans de Naboth qu’elles étaient envoyées par lui. Plusieurs des petits cônes en pierre précieuse, présentant des sujets gravés en creux et provenant de l’Assyrie, doivent avoir servi à sceller. On peut voir au musée du Louvre des sceaux en argile trouvés à Khorsabad ; ils portent une inscription en caractères cunéiformes, imprimés en creux près de l’image d’un monarque assyrien, et au revers de l’un de ces sceaux s’aperçoit la trace de l’objet sur lequel il avait été originairement appliqué. Les anciens peuples de l’Asie apposaient les sceaux comme nous apposons encore les scellés ; ils s’en servaient à la fois comme de signature sur les tablettes qu’ils employaient pour écrire et en vue d’assurer la fermeture des portes. Dans un passage du livre de Daniel (XIV, 13), il est parlé de portes scellées avec le sceau du roi. Pareille habitude existait en Égypte, et Hérodote raconte que le pharaon Rhampsinite ne savait qui accuser du vol commis dans son trésor parce que les sceaux n’avaient point été rompus. Les Égyptiens devaient se servir pour sceller de ces pierres gravées que l’on découvre par milliers sur les bords du Nil et qui abondent dans nos musées. Il existe dans la collection égyptienne du Louvre diverses empreintes de cachets sur terre non cuite. Des papyrus découverts dans le même pays avaient gardé les restes du sceau qui fixait le cordon avec lequel ils étaient noués. Les Grecs se servaient aussi de leur anneau (dactylios) pour sceller. Les pierres gravées en creux qui y étaient enchâssées et qu’on a quelquefois trouvées encore adhérentes au chaton n’avaient pas d’autre destination. Plusieurs gemmes intaillées portent le nom grec de leur propriétaire, écrit à rebours, et se reconnaissent ainsi pour des cachets. On possède de semblables pierres où sont inscrits des noms latins. Les Romains avaient effectivement imité l’usage des Grecs ; le fait est établi par de nombreux passages des auteurs anciens. Ils scellaient leurs lettres, les reconnaissances de dettes ou de dépôts qu’ils délivraient, et en général toute espèce d’actes ; ils imprimaient leurs