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tête nue. Ses yeux étaient saillans, ses lèvres épaisses, son nez était large et fort. Son abondante chevelure, séparée au milieu du front, retombait en flocons sur ses épaules. Les sceaux ne nous offrent malheureusement pas les images des Carlovingiens ; mais à partir du XIIe siècle nous rencontrons une foule de figures qu’il est difficile de ne pas prendre pour des portraits. « L’artiste qui exécutait le sceau, écrit M. G. Demay, après s’être attaché à la reproduction exacte des ornemens et du costume, s’essaie ensuite peu à peu à rendre la physionomie des personnages, et l’on peut croire qu’il a fini souvent par y réussir, en sorte que tel sceau pourrait bien être le portrait du souverain ou du seigneur lui-même. C’est ainsi qu’en contemplant la sombre figure de Charles le Téméraire on retrouve là le guerrier farouche dont les loups disputeront le cadavre aux marais glacés de Nancy. » Un passage de l’inventaire des joyaux de Jean, duc de Berry, prouve qu’il devait souvent en être ainsi, car voici comment s’exprime le garde de ces joyaux, qui les décrit en 1413 : « Item un signet d’or où est le visaige de monseigneur contrefaict au vif, » c’est-à-dire exécuté d’après nature. Les sceaux sont donc à tout prendre des simulacres plus authentiques que bien des statues ou des images en creux placées sur les tombes, exécutées ordinairement d’après un type uniforme ou à une époque fort postérieure à celle à laquelle vivait le défunt. Il faut classer les portraits sigillographiques à côté de ceux que nous offrent certaines peintures des manuscrits, par exemple de cette image de saint Louis formant l’une des enluminures du Registre des ordonnances de l’hôtel de ce roi et de ses successeurs, ou encore de cette figure de Charles V que le chapitre de Rouen faisait mettre sur l’acte consacrant la fondation de messes à l’intention du sage monarque. Et, comme l’a fait observer le marquis L. de Laborde, Du Tillet aurait bien fait d’adopter les sceaux, de préférence à tout autre modèle, pour ses portraits des rois de France. Sur les sceaux, ce ne sont pas seulement les traits, c’est encore le vêtement de nos anciens rois que nous retrouvons. Childéric Ier a porté sous sa cuirasse une tunique ; le roi Robert, fils de Hugues Capet, a sa tunique recouverte d’un manteau attaché sur l’épaule gauche et retombant en pointe sur la poitrine ; sa couronne est surmontée de trois fleurons triangulaires qui se rapprochent de la fleur de lis. Le manteau de Louis VI, le Gros, est garni de galons ou orfrois. Sur la tunique de Philippe le Hardi est passée une robe moins longue et dont les manches sont retroussées. Un des côtés du manteau de Philippe le Bel est bordé d’un large galon brodé de fleurs de lis.

Les types sigillographiques, qui nous fournissent tant de représentations intéressantes, ont été, comme je l’ai dit, répartis par les antiquaires en un certain nombre de catégories servant à les grouper