qu’on lui a fait démesurément attendre une reconnaissance qu’on avait
refusée et qu’on avait eu tort de refuser à M. Castelar, qui, lui pourtant,
était président légal, qui avait préparé la défaite de l’insurrection par
un commencement de reconstitution de l’armée, qui avait fait les premiers
efforts pour arracher l’Espagne à l’anarchie démagogique ? Nullement,
on a vu dans le gouvernement de Madrid la dernière représentation
de l’Espagne libérale, et on l’a reconnu sans lui demander même
s’il avait obtenu cette consécration populaire que lui recommandait
l’autre jour M. Layard. La France, prétend le gouvernement de Madrid,
ne fait pas une garde suffisante sur la frontière, et pour le démontrer
on remonte jusqu’à deux ou trois ans, on ramasse toutes les anecdotes
connues ou inconnues. Le gouvernement français, nous n’en doutons
pas, est disposé à remplir tous ses devoirs de bon voisinage ; mais c’est
une étrange idée de croire que cela peut suffire. Il y a quarante ans,
pendant la première guerre carliste, la France n’était point apparemment
suspecte. Elle avait fait alliance avec l’Angleterre, l’Espagne et le
Portugal ; elle avait un corps d’observation sur la frontière. Et cependant
la guerre durait jusqu’en 1840, elle ne finissait même que par un
traité. Est-ce bien sérieusement qu’on vient demander à la France de
joindre des « forces considérables » aux forces espagnoles, de mettre
les autorités de la frontière au service de la police espagnole ? Pourquoi
ne nous demande-t-on pas de livrer notre frontière ou d’aller
sur les côtes de Biscaye empêcher les débarquemens d’armes qui échappent
aux croiseurs espagnols et allemands ? Il y a dans tout cela de telles
exagérations ou de telles puérilités qu’on en est à se demander ce que
veut le gouvernement de Madrid, à quelle inspiration il obéit. Quant à
la France, elle n’a évidemment qu’à prendre note des mémoires qu’on
lui adresse, à faire son devoir sur la frontière sans s’émouvoir, et à
garder cette conviction que ses rapports de sympathie, d’amitié avec
l’Espagne, avec la véritable Espagne libérale, ne sont pas à la merci
d’un incident de diplomatie plus ou moins énigmatique.
ch. de mazade.
Votre lettre m’arrive dans le beau pays de Hongrie. C’est un grand désir de connaître cette poétique terre et une invitation de notre ami Lâszlô qui m’ont conduit ici, il y a près de deux mois. Vous connaissez Làszlô ; il invite de grand cœur, oublie les invitations qu’il a faites, et