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de bien petits résultats. Presque tous les établissemens utiles ont été fondés et dotés avec l’argent des particuliers au moyen de legs et de donations. L’état n’a presque rien fait ; ses deniers ont toujours passé entre les mains des gens qui, par leur voix ou leur influence, ont tour à tour porté au pouvoir les ministres qui se sont succédé. La royauté coûte cher, puisqu’en comptant la liste civile et ses accessoires, elle absorbe plus de 2 millions sur les 40 que perçoit le trésor. L’armée coûte plus cher encore et dévore plus du quart de la recette. Elle est cependant d’une utilité contestable, car elle ne pourrait ni porter la guerre au dehors, ni l’arrêter à la frontière. Il est question de la supprimer et d’armer sans frais la nation entière ; mais rien encore n’a été réalisé en ce sens. Enfin l’administration, ayant pris une couleur politique grâce à l’antagonisme des partis, ne rend pas des services proportionnés à ce qu’elle coûte. Les voyageurs européens qui visitent la Grèce et les rapports des agens salariés constatent ce mauvais état des choses. Le crédit du pays en souffre, et, s’il se produit quelque projet utile, on ne trouve pas en Europe les capitaux nécessaires pour l’exécuter.

Nous en avons eu récemment plusieurs exemples. Une compagnie franco-belge, comprenant les capitalistes les plus sérieux, s’était formée pour exécuter un chemin de fer du Pirée à la frontière de Turquie. De là cette ligne devait gagner d’une part Salonique et Constantinople, de l’autre l’Adriatique et Trieste. Ce dernier tracé abrégeait la route de l’Orient et mettait toute l’Europe centrale et septentrionale en communication avec Suez par la voie la plus courte. Les études furent faites, la concession fut accordée ; puis, les fonds tardant à venir, un ministère nouveau se hâta de prononcer la déchéance d’une société formée sous le ministère précédent. Des spéculateurs grecs de Constantinople ont essayé de refaire cette compagnie et ont obtenu une concession nouvelle, mais ils ont moins de chance encore de trouver les capitaux européens dont ils ont besoin : personne ne veut employer son argent sur le sol hellénique, parce que le pays n’est pas assez bien administré. Quand on voit un gouvernement de faire ce qu’un autre avait commencé et contester des droits que l’on croyait acquis, le capital, chose timide, fait un pas en arrière et disparaît.

Une autre affaire a dans ces dernières années attiré l’attention de toute l’Europe et mis un instant aux abois la diplomatie. C’est celle du Laurium. Tout le monde sait que l’ancienne Athènes tirait une partie de ses revenus des montagnes de l’Attique qui portent ce nom. Son exploitation du plomb argentifère a laissé des monticules de scories assez riches encore pour être traitées par les procédés modernes. Une compagnie franco-italienne se forma et en obtint la