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ciel ; plus d’une fois les chercheurs de comètes ont été trompés par ces apparences et ont annoncé une comète nouvelle lorsqu’ils avaient simplement découvert une nébuleuse qui ne figurait pas sur leurs cartes. D’après l’ingénieuse hypothèse du directeur de l’observatoire d’Utrecht, M. Hœk, que la mort a récemment enlevé à la science, les comètes nous arrivent par essaims des profondeurs de l’espace ; faut-il croire que ce sont des nébuleuses errantes ?

L’examen prismatique de la lumière des comètes, entrepris par M. Huggins, le père Secchi, MM. Wolf et Rayet, a démontré que ces astres sont lumineux par eux-mêmes, bien qu’ils doivent une partie de leur éclat aux rayons du soleil, qu’ils réfléchissent comme les planètes. La lumière réfléchie donne un faible spectre continu qui forme le fond sur lequel se détachent les raies ou plutôt les bandes brillantes du spectre cométaire proprement dit. De l’observation de la première comète de 1866, M. Huggins avait cru pouvoir conclure que la matière des comètes était au fond la même que celle des nébuleuses : de l’azote ou une substance élémentaire que renferme l’azote ; mais le père Secchi, qui avait étudié le même astre, contestait l’identité des spectres admise par M. Huggins. Depuis lors les comètes de 1868, de 1870, de 1871, de 1873, de 1874, ont fourni l’occasion d’étudier la question d’une manière plus complète. M. Huggins a constaté que le spectre de la seconde comète de 1868 (comète de Winnecke), composé de trois zones brillantes, avait la plus grande ressemblance avec celui du carbone, obtenu en faisant jaillir l’étincelle d’induction dans le gaz oléfiant. La première comète de 1868 (comète de Brorsen) en différait notablement par la situation des zones lumineuses. Les comètes assez nombreuses des années suivantes ont donné des résultats analogues. Presque toujours on distingue trois bandes lumineuses, une jaune, une verte et une bleue, et la bande verte est la plus intense des trois. On peut supposer que la matière cométaire est un composé de carbone à l’état gazeux, — un carbure d’hydrogène, — ou peut-être, comme le pense le père Secchi, un composé oxygéné, tel que l’oxyde de carbone ou l’acide carbonique. Le spectre continu qui forme le fond du spectre cométaire ne s’observe que si les comètes ont un noyau assez prononcé ; il est certainement dû en partie à la réflexion de la lumière du soleil, mais il est possible aussi que le noyau y contribue par sa radiation propre. En tout cas, ces observations semblent prouver que la constitution chimique des comètes ne ressemble guère à celle des nébuleuses.

En présence de ces recherches, qui soulèvent déjà un coin du voile étendu sur le laboratoire de la nature, la pensée se reporte involontairement aux origines et aux destinées de notre monde à nous. De quel jour le principe nouveau de l’unité des forces natu-