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livraisons ont déjà paru; celle que nous avons sous les yeux traite des Psaumes, cette partie de l’Ancien-Testament aussi populaire que mal connue quant à ses origines et à l’esprit qui l’inspire. Cette étude nous amènera d’elle-même à des considérations relatives à la poésie hébraïque en général. Elle pourra contribuer à répandre quelques notions précises sur un sujet qui n’intéresse pas moins l’histoire de l’antique poésie que celle des sentimens religieux, dont les psaumes, à tous les points de vue, demeurent une des plus énergiques et des plus touchantes expressions.


I.

Il est d’abord un certain nombre de phénomènes qu’on pourrait appeler « de la surface, » et qu’il convient d’expliquer avant d’aborder le centre même du sujet.

L’Ancien-Testament se divise en trois groupes de livres, la Loi, comprenant le Pentateuque ou les cinq livres dits de Moïse, les Prophètes, parmi lesquels on range aussi les livres historiques supposés écrits par des prophètes ou conformément à leurs principes, enfin les Hagiographes ou livres d’édification ajoutés plus tard aux deux premiers groupes, et contenant plusieurs écrits d’une grande valeur, tels que les Psaumes, les Proverbes, Job, l’Ecclésiaste, Daniel, etc. Comme cette dernière série commençait par les Psaumes, on la désignait parfois aussi par le nom de ce livre initial, et dans un temps où le mot Bible n’avait pas encore perdu son sens de livre en général, on résumait le contenu tout entier de la Bible juive par ce triple titre : la Loi, les Prophètes et les Psaumes.

Les psaumes ou tehilim, c’est-à-dire chants de louange, forment dans les Bibles hébraïques, grecques, latines et modernes, une collection de cent cinquante cantiques, et ce nombre est resté immuable, bien que les versions ne s’accordent pas toujours sur la manière de les chiffrer séparément[1]. Notre mot psaume est grec et signifiait proprement un chant accompagne par les instrumens à cordes. Le psaltérion était un instrument de ce genre, que l’on touchait avec les doigts ou avec l’archet. L’idée qui a évidemment présidé au rassemblement des cent cinquante psaumes en un seul livre fut la convenance de mettre un recueil de

  1. Pour éviter des complications fastidieuses, nous indiquerons le chiffre des psaumes dans cette étude d’après le texte hébreu qu’ont suivi la plupart des versions modernes. La version grecque des Septante et la Vulgate en diffèrent en ce que les psaumes 9 et 10 du texte hébreu n’en font qu’un. De plus les psaumes 114 et 115 du texte hébreu sont réunis sous le chiffre 113 dans les versions grecque et latine, tandis que le numéro 110 hébreu forme chez elles deux chants distincts. Il en est de même du numéro 147 hébreu, qui se trouve scindé en doux cantiques en grec et en latin.