Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 12.djvu/295

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Moulin-Quignon avait mis à son tour, quelques années auparavant, tous les géologues, tous les anthropologistes en émoi.

Après les placers d’eau et les placers secs vinrent les mines de quartz. Quand on eut assez remué la terre meuble ou les graviers et les conglomérats cimentés, qui tous avaient été lavés une première fois par la nature, on commença d’attaquer la roche massive, restée en place et intacte. D’où venait tout l’or qu’avaient roulé les alluvions? Évidemment de roches solides, de ces filons siliceux ou quartzeux dont on rencontrait en différens points les masses inclinées, blanches, vitreuses, cristallines, très dures, adossées à des granits, à des porphyres, à des roches vertes ou dioritiques, qui forment comme l’épine dorsale de la Sierra-Nevada et de ses contre-forts, ou recoupant les schistes noirs, ardoisés, feuilletés, d’âge primitif, qui s’appuient sur la grande chaîne et ses ramifications. Les têtes de ces filons, les parties qui se montraient au jour, avaient été désagrégées, labourées, avant l’apparition de l’homme sur le globe, par d’effroyables déluges, d’autres disent par d’énormes glaciers en marche, et l’or, entraîné avec les débris de la roche quartzeuse, s’était déposé avec ceux-ci dans les vallées. Une de ces veines de quartz, la veine-mère ou mother-lode de Californie, a 300 milles de long, la distance de Lyon à Paris. Elle peut être suivie comme une véritable muraille de silex blanc du sud au nord du pays, dans les vallées du San-Joaquin et du Sacramento, sur 5 degrés de latitude. Entre matin et soir, je ne l’ai pas perdue de vue pendant une de mes excursions dans les comtés de Mariposa et de Tuolumne. Plus tard je l’ai également retrouvée au centre de l’état, dans les comtés de Calaveras et Amador, où elle semble disparaître, car plus au nord, dans les comtés d’Eldorado, de Placer, de Nevada, ce sont des filons différens qu’on exploite. Partout la grande veine est aurifère, mais avec des richesses et des épaisseurs différentes suivant les localités. La direction reste toujours la même et court du nord-ouest au sud-est, comme l’axe de la Sierra-Nevada ou la ligne générale du rivage le long du Pacifique et à ces latitudes. Des filons secondaires se détachent de la veine-mère, la croisent sous des angles plus ou moins aigus; d’autres veines courent parallèlement à elle. Dans les comtés du nord, le faisceau métallifère est d’une direction et d’un âge différens. Quant au mode de formation de tous ces filons, les uns invoquent pour l’expliquer la seule action du feu souterrain, qui aurait amené du centre du globe la silice avec l’or en fusion; d’autres, plus réservés, font intervenir ensemble l’eau et le feu, et admettent que des sources minérales bouillantes, contenant en dissolution la silice et des combinaisons très peu stables d’or, ont laissé déposer le