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rhétorique, comme ces lettres de scribes, commentées par M. Maspero, en troisième lieu des ouvrages écrits, ce semble, uniquement pour le plaisir de l’esprit, comme le roman des Deux Frères ou celui du Prince destiné. On peut y ajouter des fragmens relatifs à l’administration de la justice et du droit, et de véritables mémoires, comme l’autobiographie d’Amenemba Ier et celle de l’aventurier Saneha. Ce sont là, avec les grandes inscriptions contenant des récits de victoires, les élémens d’une sérieuse information historique. Viendrait ensuite une littérature toute scientifique, des traités de médecine, de géométrie, de calcul, des descriptions de métiers, etc. Les œuvres de l’art égyptien sont le commentaire direct et lumineux des textes. Il y a longtemps qu’on sait quels graves problèmes suscite l’étude de cet art vraiment original, mais non pas dégagé de toute solidarité avec l’art hellénique. Le nombre de ces problèmes s’est accru avec celui des monumens découverts. Enfin le progrès des études hiéroglyphiques a enrichi et fortifié une science déjà puissante, la philologie comparée, et l’a conduite à des solutions inattendues, peut-être définitives, sur quelques-unes Ses difficultés concernant la primitive antiquité égyptienne.

Ces sources d’instruction, désormais nombreuses, ne permettent-elles pas de donner quelque sorte de réponse à la question de savoir si ces peuples, dont les annales positives remontent à une antiquité formidable, à quatre mille ans au moins avant l’ère chrétienne, avaient une réelle parenté d’intelligence avec les autres peuples historiques ? On a dit par exemple que le génie égyptien avait à peine une histoire, qu’il n’était qu’immobilité, qu’il n’avait pas connu le changement et le progrès. Cette sorte d’axiome de nos anciens livres est désormais démenti, et les destinées égyptiennes rentrent, comme on devait s’y attendre, dans les conditions ordinaires de l’humanité. Ethnographiquement, cette race est parente non pas des nègres de l’Afrique, comme on l’a cru, mais des populations blanches de l’Asie antérieure ; sa langue se rapproche de l’hébreu et du syriaque. On peut l’appeler une race proto-sémitique, en ce sens que « l’égyptien et les langues diverses des Sémites, après avoir appartenu au même groupe, se sont séparés de très bonne heure, quand leur système grammatical était encore en voie de formation. Désunies et soumises à des influences diverses, les deux familles ont fait un différent usage des élémens qu’elles possédaient en commun. Tandis que l’égyptien, cultivé plus tôt, s’arrêtait dans son développement, les langues sémitiques continuaient le leur pendant de longs siècles encore avant d’arriver à la forme qu’on leur voit aujourd’hui. » Ainsi s’exprime M. Maspero ; M. de Rougé pensait de même : il y avait, suivant lui, un rapport évident entre la langue de l’Égypte et celles de l’Asie