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plus modestes de M. Cordier, résumés dans la progression suivante : sur 1,000 arbres plantés en massif et exploités par éclaircissemens successifs, on peut abattre à cinq ans 500 arbres valant 600 francs, à dix ans 250 arbres valant 1,313 francs, à quinze ans 125 arbres valant 1,473 francs, à vingt ans 60 arbres valant 1,521 francs, à vingt-six ans 60 arbres valant 3,195 francs, soit un total brut de 8,102 francs, ce qui représente pour l’exploitation quinquennale de 1 hectare un revenu annuel de 300 francs environ. S’il y a loin de ce chiffre aux résultats rêvés par l’enthousiasme de certains planteurs, il représente néanmoins un très beau profit et peut largement encourager les colons à la plantation des eucalyptus. D’ailleurs, ajoute M. Cordier, dans ces notes inédites qu’il communiquait à M. Ramel en 1871, le produit des plantations en ligne sera plus considérable que celui des plantations en massif, — à plus forte raison, ajouterions-nous, celui d’arbres isolés venus dans des conditions favorables ; mais on sort alors de la sylviculture, et les calculs se modifient suivant les conditions très variables de la culture de fantaisie.

Sur quelle base M. Trottier a-t-il fondé son estimation de l’accroissement annuel de l’eucalyptus ? Sur la moyenne constatée au Hamma d’un grossissement de tronc d’environ 13 centimètres (en circonférence) par année : comme il s’agit là d’arbres plantés en ligne, M. Trottier croit pouvoir admettre 10 centimètres pour des arbres plantés en massif ; mais il oublie que les 1,000 eucalyptus de 1 hectare ne pourront arriver tous à vingt-six ans sans se nuire les uns aux autres et sans qu’un éclaircissement nécessaire en réduise progressivement le nombre. M. Cordier a tenu compte de ce déficit forcé, d’où la différence de ses résultats, bien qu’il accepte comme bases d’évaluation et la moyenne de croissance et le prix supposé des produits tels que les donne M. Trottier. Il ne m’appartient pas du reste de vouloir juger ce différend : ce soin revient aux hommes pratiques, aux sylviculteurs. La question se résoudra d’ailleurs par les faits et l’expérience, non pas dans un sens unique, mais avec la diversité que comportent de telles évaluations : l’essentiel est qu’on soit assuré d’avance que le bois d’eucalyptus est destiné dans un avenir prochain à tenir une place considérable dans l’ensemble des productions de notre riche colonie.

Une autre question qui se résoudra par la pratique, c’est de savoir dans quels terrains le nouvel arbre sera le plus avantageusement planté. Au point de vue de l’assainissement et de la rapidité, de croissance, ce sont les terres basses, marécageuses et chaudes qui semblent lui convenir de préférence ; mais, comme, d’après les indications de M. Mueller, l’espèce dans ses forêts naturelles