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LE GENERAL
PHILIPPE DE SEGUR
SA VIE ET SON TEMPS

II.
LES ANNEES D'EPREUVE MORALE[1]

La charge de Sommo-Sierra est comme le point culminant, non pas dans la carrière militaire de Ségur, mais dans cette voie héroïque où nous l’avons suivi. La bravoure et le dévoûment ne sauraient aller plus loin. De ce sommet, si l’on peut s’exprimer de la sorte, il va redescendre en des vallées moins âpres, en des chemins moins abrupts. Ce sera aussi le moment où l’empire déclinera, où le génie de l’empereur, toujours extraordinaire et toujours capable de se ressaisir lui-même aux heures décisives, subira pourtant de profondes atteintes. Placé de manière à tout voir, Ségur pourra noter bien des choses qui ont échappé aux historiens les plus habiles. Ces dernières années de l’empire, toutes pleines de gigantesques entreprises et de catastrophes tragiques, seront pour lui des années d’épreuve morale, pleines d’avertissemens et de leçons. Après les heures d’apprentissage guerrier, voici les heures d’apprentissage philosophique. Rien n’est changé dans ses rapports avec l’empereur ; il est toujours aussi dévoué à son maître, aussi pénétré d’admiration et de reconnaissance, aussi convaincu du rôle que la

  1. Voyez la Revue du 15 février.