demandes de Duncan, et par son inaction au milieu du bombardement il s’exposa de la part de ses camarades aux plus justes critiques.
Les confédérés, à la nouvelle de l’approche de la flotte de Farragut, n’avaient pas jugé toutefois que ces navires fussent une protection suffisante pour la Nouvelle-Orléans, et ils avaient voulu fermer l’entrée du Mississipi comme les Russes avaient fermé celle du port de Sébastopol. La grande profondeur du fleuve, qui est de quinze à vingt-cinq brasses, ne permettait pas de couler des navires dans son lit, car les mâts eux-mêmes auraient disparu sous les eaux ; Lowell voulut suppléer à ce genre d’obstacle par un barrage flottant. Une énorme chaîne apportée de Pensacola fut tendue de bord à bord à la hauteur du fort Jackson, en un point où le Mississipi n’a que 660 mètres de large. De gros troncs de cyprès, de 10 mètres de long et disposés dans le sens du courant à peu de distance l’un de l’autre, portaient cette chaîne, et le tout était fortement amarré sur sept ancres placées en amont. Malheureusement pour les confédérés cet obstacle formidable n’obstruait que trop bien le cours du fleuve. Lorsqu’au printemps ses eaux commencèrent à monter, inondant les deux rives et enveloppant d’une barrière impraticable à l’infanterie toutes les approches des forts, elles apportèrent les nombreux débris arrachés par le Mississipi aux forêts qui bordent son cours supérieur et qu’il charrie tous les ans jusqu’à la mer. Le barrage les arrêtant, les troncs accumulés formèrent bientôt une masse flottante qui s’élevait jusqu’au fort Saint-Philippe, et un jour vint naturellement où le poids de cette masse brisa l’obstacle qui la retenait. C’était à la fin de février. Au moyen des contributions des habitans de la Nouvelle-Orléans, car le trésor confédéré était sans ressources, Lowell se mit aussitôt à l’œuvre pour réparer ce désastre. Onze coques de bricks furent amarrées dans le fleuve et reliées par une chaîne légère qui, tantôt relevée, tantôt immergée, laissait passer tous les corps flottans, tandis que le gréement de ces bâtimens, abattu dans l’espace qui les séparait, devait embarrasser les hélices des navires qui s’en approcheraient. Une portion seulement de l’ancien barrage fut conservée sur la rive droite ; enfin un étroit passage fut ménagé pour les vaisseaux confédérés qui voudraient gagner la haute mer. Cet obstacle était encore assez puissant pour arrêter quelque temps la flotte fédérale et la tenir ainsi exposée au feu convergent de plus de cent canons placés sur les deux rives.
En effet, les deux grands forts et les batteries qui en dépendaient étaient armés de cent cinquante pièces. Le fort Saint-Philippe, établi sur l’angle saillant d’un coude du fleuve, l’enfilait dans deux directions. Le fort Jackson, situé un peu plus bas, était plus