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de 1868, M. Buiz-Gomez, successeur de M. Camacho, à la fin de 1872 a reconnu qu’il dépassait alors 250 millions ; dans les deux exercices suivans, on porte la même estimation. En additionnant donc ces insuffisances de chaque budget, on devrait arriver à un total, pour la dette flottante, double du chiffre accusé dès 1872, et c’est précisément pendant ces dernières années qu’ont été employés, pour satisfaire autant que possible aux engagemens de l’état, tous les artifices financiers dont nous avons redouté l’énumération pour le lecteur.

Au fond, les mesures adoptées successivement n’ont eu qu’une même base, l’escompte du produit des ventes des biens nationaux. Les propriétés civiles et religieuses, — biens des corporations, des communes, de l’église, — auxquelles dans les plus mauvais jours de la révolution on a voulu joindre la succession de Manuel Godoy et quelques lambeaux des propriétés de la couronne, forment le fonds où tous les gouvernemens puisent dans les jours difficiles. Les biens nationaux se vendent aux enchères publiques, sur une mise à prix fixée par une commission gouvernementale. Payables d’abord en dix ans, on les a vendus plus tard à des délais moins courts. Le premier terme est versé comptant : pour les autres, l’acquéreur remet des pagarès, billets à l’ordre de l’état, endossables et négociables. C’est sur la possession et la transmission de ce gage qu’ont été édifiés les systèmes employés tour à tour afin d’obtenir les avances dont on avait besoin. Pagarès-Fould, bonos-Figuerola, billets hypothécaires, échange des titres de l’état contre les titres des banques fondées pour la négociation de ces mêmes valeurs, création de la banque de Castille, constitution de la banque nationale elle-même, tout a pour unique but l’escompte des engagemens des acquéreurs de biens nationaux. Tantôt le gouvernement les prend ; tantôt il les livre pour les reprendre et s’en servir de nouveau, en faisant souvent double emploi de la même valeur ; il ne s’arrête que lorsque le public se-refuse à ces combinaisons multiples, et c’est ainsi que la dernière émission des billets hypothécaires a été suspendue faute de garantie. Tout d’abord en effet les pagarès n’étaient que des engagemens de biens vendus et constituaient une ressource réelle exposée seulement aux chances peu redoutables de l’insolvabilité des acquéreurs ; depuis que, par la formation de sociétés spéciales, on a voulu créer des titres représentait des biens à vendre, le crédit de ces titres n’a plus offert les mêmes sécurités. Au 31 mars 1873, les pagarès représentant les ventes effectuées s’élevaient à la somme de 478 millions de francs. Depuis lors les ventes de biens nationaux n’ont sans doute pas atteint la moyenne des années antérieures. Enfin combien reste-t-il