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Page:Revue des Deux Mondes - 1875 - tome 9.djvu/670

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Convient-il toutefois de créer un bureau de bienfaisance dans chaque commune ? Cette question fort délicate figurait en tête du questionnaire soumis à l’enquête. Elle a reçu de presque tous les déposans une réponse favorable. Les conseils-généraux notamment, et nous n’avons pas besoin de faire ressortir l’importance qui s’attache à leur déposition, ont été très explicites. Sur soixante-seize qui ont répondu à l’appel de la commission, soixante-huit ont considéré cette création comme nécessaire et l’ont affirmée avec force. Tout au plus ont-ils laissé entrevoir la possibilité de grouper ensemble plusieurs petites communes lorsque le fonctionnement du bureau paraîtrait trop ingrat ou trop difficile. Huit conseils-généraux seulement ont combattu cette mesure comme inutile et imprudente.

Les raisons invoquées en faveur de la création d’un bureau de bienfaisance dans les communes qui en sont encore dépourvues sont très concluantes. On fait ressortir qu’il existe à peu près partout des besoins à soulager ; dans les localités privilégiés où ces besoins ne sont pas permanens, ils sont au moins accidentels. Il n’est pas de commune qui n’ait à compter avec l’incendie, les mauvaises récoltes, ces fléaux des campagnes, avec la maladie, la vieillesse, les accidens, ces fléaux de l’humanité. Dans les villes, la charité est ingénieuse à revêtir mille formes pour aller saisir dans les bourses les mieux fermées l’aumône nécessaire aux bonnes œuvres ; dans les campagnes, il n’en est pas ainsi : on ne peut compter sur l’initiative individuelle, il faut une institution chargée de ce soin, une institution qui ait un caractère public et inspire aux populations rurales une confiance parfaite, car il existe partout une charité latente qu’il faut savoir dégager, et les efforts généreux qu’on devra tenter dans ce sens doivent avoir pour point d’appui le bureau de bienfaisance. On ajoute que, si l’organisation de l’assistance publique ne s’étend pas partout, les inégalités les plus fâcheuses ne tarderont pas à se produire. Les communes dotées d’établissemens charitables verront affluer chez elles les pauvres des communes qui n’en possèdent pas, la mendicité ambulante ne pourra pas disparaître, et les mesures prises par le législateur contre le vagabondage ne seront pas plus efficaces que par le passé. Il en sera tout autrement, si chaque commune, suivant la règle formulée par le concile de Tours, est invitée à secourir ses pauvres et à se créer des ressources pour assurer, avec le concours du département et de l’état, cet important service, dont la base sera naturellement le bureau de bienfaisance.

Cependant l’idée d’établir un bureau dans chaque commune compte de redoutables adversaires, parmi lesquels il faut citer l’administration supérieure, qui la combat depuis longtemps. Dans