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une circulaire du ministre de l’intérieur en date du 10 avril 1852, on trouve développée tout au long cette pensée, qu’il y a plus d’inconvéniens que d’avantages à multiplier les établissemens de bienfaisance qui sont dépourvus de dotations propres et ne peuvent disposer que de ressources éventuelles. « Outre le danger, dit le ministre, de développer ainsi le paupérisme en habituant les hommes à compter sur l’assistance publique plutôt que sur eux-mêmes, il y a celui de leur offrir un appât trompeur en leur faisant espérer des secours qu’on peut se trouver dans l’impossibilité de leur accorder et de faire naître des exigences qui, n’étant pas satisfaites, s’arment contre la société du bien même qu’elle a voulu, mais qu’elle n’a pas pu accomplir. » Conformément aux principes déduits dans cette circulaire, il devint d’usage et en quelque sorte de jurisprudence sous l’administration impériale de ne donner aux communes l’autorisation de créer un bureau de bienfaisance que lorsqu’elles pouvaient justifier en faveur de ce bureau d’un revenu assuré de 50 francs au minimum.

Cette doctrine paraît prévaloir encore aujourd’hui au ministère de l’intérieur. Nous la trouvons à peu près reproduite dans le rapport de l’inspection générale des établissemens de bienfaisance dont nous avons déjà parlé. « La loi du 7 frimaire an V, dit le rapport, voulait créer un bureau de bienfaisance par commune. Sans demander l’exécution des dispositions de la loi, on pourrait se borner à engager les administrations locales à provoquer la création d’un bureau de bienfaisance dans toute commune ayant une population supérieure à 1,000 habitans, et surtout dans toute commune chef-lieu de canton. Il conviendrait également de convertir en bureau de bienfaisance toutes les commissions charitables chargées de la distribution des secours provenant de fondations, de souscriptions, de subventions communales, lorsqu’elles possèdent une dotation suffisante pour assurer la permanence et le fonctionnement du bureau. — Aller au-delà, vouloir créer administrativement dans chaque commune un bureau de bienfaisance, ce serait grossir inutilement la liste des bureaux qui ne peuvent fonctionner faute de ressources ou qui n’ont pas à délivrer de secours faute d’indigens ; ce serait décourager les efforts de la charité privée et créer le paupérisme là où il n’existe pas. »

Ainsi des hommes dont on ne peut contester la haute compétence, des fonctionnaires admirablement placés pour étudier et juger d’ensemble la situation d’établissemens qu’ils inspectent et surveillent sans cesse, redoutent de voir étendre le nombre des bureaux, et n’en proposent la création que dans les chefs-lieux de canton et dans les bourgs qui comptent au moins 1,000 habitans. Certes il y